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Volodymyr contre Vladimir

Deux portraits qui se font face dans un contraste saisissant. Volodymyr Zelensky, devenu la figure d’une résistance insoupçonnée. Chaque jour, il tourne ses vidéos comme un journal de bord dans les rues de Kiev en état de siège. Quitte à glisser des infox çà et là, il faut le reconnaître. C’est de bonne guerre, après tout, cela permet de remonter le moral des troupes et mettre du baume aux cœurs meurtris. Prêt à tomber pour que la patrie tienne debout. Les yeux brillants d’une lueur pleine d’espoir, sourire au coin des lèvres et poing rageusement levé, il rappelle Européens et Américains à leurs responsabilités. Il est loin le temps où il jouait au président dans sa série Serviteur du peuple et amusait la galerie sur scène. Le monde entier a assisté, dès l’assaut des interminables colonnes de chars et des premières bombes larguées sur Kharkiv jusqu’à Marioupol, à la naissance d’un chef qui force aujourd’hui le respect. Rien d’étonnant à ce que les citoyens s’emparent des armes. Ils ne sauveront peut-être pas leur pays. Sa fierté, c’est à n’en pas douter. Voici l’Ukraine courageuse de Volodymyr.

Celle qu’exècre Vladimir Poutine, va-t-en-guerre impitoyable. Regard vide et visage figé, il martèle ses allocutions martiales ponctuées de menaces lâchées dans une froideur glaçante. Indifférent aux destins brisés, aux existences perdues sur les routes de l’exil. Aux enfants déjà orphelins, aux femmes déjà veuves. Retranché dans son bureau, seul au bout de tables toujours plus longues pour mieux garder ses interlocuteurs à distance. Les dirigeants étrangers autant que ses propres généraux. Le président ne se laisse plus approcher et ne supporte de toute manière aucune contradiction. L’opposition est bâillonnée, la population désinformée. Réprimée quand elle se fait trop bruyante. Les manifestants sont délogés manu militari des rassemblements à Moscou, les dames âgées embarquées à Saint-Pétersbourg. Yelena Osipova, artiste militante de 77 ans, tenait des pancartes. Deux bouts de carton. Comme cette productrice à la première chaîne de la télévision d’État, Marina Ovsyannikova, qui a osé dénoncer la propagande du pouvoir en direct. Elle paiera cher cet acte de bravoure. Voici la Russie rêvée de Vladimir.

Alexandra Parachini