L’être humain – pardon : le consommateur – s’engouffre parfois dans des situations paradoxales. La course effrénée vers le moins cher en est une. Le problème posé par le site Wish (dossier du Quotidien papier du 11 juillet) n’est pas économique. Il est social, philosophique, même. A-t-on le droit moral, au Luxembourg comme ailleurs, de chercher sans scrupules les produits à prix cassés et ainsi fermer les yeux sur leur provenance ? Rappelons que sur le site en question, certains produits sont même gratuits…
Évidemment, il est inutile de demander que les entreprises qui fabriquent ces biens respectent les conditions de travail de ses employés. «Mais qu’importe, vous avez vu le prix !» Quant aux normes européennes de sécurité (on pense à l’électronique, aux jouets…), les chances sont grandes pour que les usines en question n’en aient jamais entendu parler. «Un prix pareil, ça vaut bien un petit risque !»
Avant de donner sa caution au libéralisme le plus sauvage et la dérégulation la plus débridée, il est peut-être temps de déterminer quelles sont, au fond, les priorités. Nous sommes européens, nous avons la chance de profiter d’un État qui soutient sa population la plus vulnérable. Nos enfants vont à l’école gratuitement. En cas d’urgence, les hôpitaux vous soignent avant de vous demander le numéro de votre carte bleue. Tout cela a un coût pour la collectivité et c’est grâce à l’impôt que ce système tient tant bien que mal sur ses jambes. Vouloir contourner l’impôt (la TVA, ici) par tous les moyens, c’est refuser de contribuer à l’effort commun. C’est mettre ses petits intérêts personnels devant les grands enjeux collectifs.
On ne dit pas, là, qu’il faut nécessairement payer plus, par principe. Dans le nord de la France, les supermarchés Lidl ont conclu un accord avec le groupement des producteurs de porcs. Sans intermédiaires et avec un prix au-dessus du marché, tout le monde fait des affaires, clients, producteurs et commerçants. Payer moins en toute intelligence, c’est possible. Mais pas avec Wish.
Erwan Nonet