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Vautours 2.0

Encore une vidéo de violence. Encore une vidéo où l’on voit des jeunes molester un de leurs camarades devant de nombreux témoins de leur âge. Encore une vidéo où l’on constate que la préoccupation première de ceux qui font face à la violence est de sortir leur téléphone portable pour filmer toute la scène. Nos confrères du Wort ont reçu ce document d’une violence consternante de façon anonyme. Les faits se sont déroulés apparemment à un arrêt de bus situé sur la route de Thionville à Luxembourg, à hauteur du concessionnaire automobile, en face d’un lycée. La police, avertie, s’est emparée de l’affaire et a ouvert une enquête.

Ce n’est pas la première fois que le Grand-Duché découvre ce type d’images et de comportement. De jeunes personnes occupées à documenter la scène et à l’envoyer fièrement à leurs proches, leurs amis, comme une prise de guerre. Combien étaient-ils pour stopper ce déferlement de violence? Combien étaient-ils autour de ce spectacle sordide pour filmer la scène sous tous les angles? Honnêtement, l’inquiétude monte quand on voit ce type d’affaire. Ces jeunes citoyens 2.0 ont-ils encore un peu de dignité? Les réseaux sociaux ont créé des monstres en cela qu’il faut s’y démarquer pour exister virtuellement, même de la pire des façons. Évidemment, le voyeurisme devant une scène violente a toujours existé. Les policiers ont toujours dû gérer des automobilistes qui ralentissaient devant des accidents par curiosité. C’est comme ça. Mais aujourd’hui, un degré supplémentaire est franchi. De simples spectateurs intrigués, les jeunes présents dans la vidéo sont de véritables réalisateurs prêts à partager leur expérience. Pour du clic? Pour de la notoriété? Pour des réactions flattant leur ego? Et personne n’a averti la police ou partagé sa vidéo avec les forces de l’ordre. Il a fallu que des anonymes envoient le document à la presse pour qu’une enquête soit ouverte. Le courage citoyen pour stopper le déferlement de coups n’a même pas effleuré l’esprit des témoins de la scène qui s’est déroulée devant un lycée au cœur d’une grande artère de la capitale. Si vous êtes en danger ou agressé, dites-vous bien qu’on ne vous aidera pas. À la place, des vautours tourneront autour de vous, smartphone à la main.