Le retour aux «valeurs» est une tendance de fond, marque de fabrique des populistes de tout poil qui ont actuellement le vent en poupe. La peur de perdre sa culture, sa façon de vivre face à une mondialisation agressive est légitime. Mais ce retour aux valeurs traditionnelles se confronte à une société moderne et progressiste. Ainsi, on s’attaque aux minorités, à la communauté LGBT, mais également aux femmes. Car garder ses valeurs, pour certains, c’est rester à une époque où seul l’homme, en bon père de famille, était le garant de la société et de ses bonnes mœurs.
Alors, face à des politiques plus ouvertes, avec le mariage pour tous par exemple, ou encore la montée du féminisme qui prône simplement une égalité de traitement entre hommes et femmes, les populistes proposent une vision de la société figée dans le passé. C’est le cas de la Russie qui a adopté il y a quelques jours une proposition de loi visant à dépénaliser les violences domestiques. À l’heure actuelle, le pays ne se démarque pas avec des politiques particulièrement progressistes, mais c’est un pas de plus vers un modèle de société traditionnel et patriarcal. À l’origine de ce texte, une députée ultraconservatrice, Yelena Mizulina.
Motif invoqué pour cette loi : «Préserver la tradition de l’autorité parentale.» Autrement dit, ce qui se passe au sein de la famille restera du domaine privé. Alors que la plupart des actes de violence et des agressions diverses ont justement lieu au sein du cercle familial. Dépénaliser les violences domestiques, c’est recouvrir d’un épais tapis une réalité que les sociétés progressistes ne cessent de dénoncer pour le bien des victimes, la plupart des femmes et des enfants.
Garder ses valeurs et sa culture est une chose, mais perpétuer une culture de la violence et laisser ses auteurs en toute impunité en est une autre. Quel dommage que les politiques russes pensent devoir passer par le dénigrement des droits de certains pour garder leur «culture». Un retour en arrière qui n’est pas l’apanage des Russes, et qu’il faudra surveiller de près.
Audrey Somnard