Les missiles nord-coréens pleuvent en mer du Japon, ces dernières semaines. Difficile de faire le décompte, tant Kim Jong-un n’arrive plus à décoller son doigt du bouton de lancement. Samedi, les ogives ont même fusé comme un soir de feu d’artifice. Et à l’aube encore naissante mardi, il en a expédié deux de plus, au moment où un avion en provenance de Paris atterrissait à Séoul. À son bord, la délégation luxembourgeoise emmenée par Xavier Bettel, venue commémorer l’armistice de la guerre de Corée, il y a exactement soixante-dix ans ce jeudi. Cette guerre fratricide qui a déchiré la péninsule en deux nations depuis irréconciliables.
Personne n’attendait du reste un accueil plus cordial de Pyongyang qui, pour célébrer la fin des combats meurtriers, déroule le tapis rouge au voisin russe toujours occupé à détruire l’Ukraine. Tandis que de l’autre côté de la frontière, les canons résonnent en l’honneur des vétérans. Ceux qui se sont engagés dans la bataille, avec l’espoir de réunifier le Nord et le Sud. Qui ont vu le sang couler et leurs frères d’armes tomber.
Ambiance pour le moins contrastée donc, de part et d’autre de la zone démilitarisée. Ici, l’on fait vœu de ne jamais oublier les sacrifices humains. Là, on insulte l’avenir en répétant inlassablement les mêmes erreurs. Au prix de l’existence des innocents. Les enjeux stratégiques et géopolitiques peuvent expliquer – sans jamais justifier – ce besoin insatiable de violence. Mais il y a aussi une dimension quasi mystique qui échappe au commun des mortels. Cette volonté des hommes transcendés par le pouvoir à vivre éternellement en guerre, tout en aspirant à reposer en paix quand l’heure viendra.
La famille coréenne n’est, de toute évidence, pas près de se rabibocher. Kim Jong-un continuera de tirer un missile à chaque coup de colère. À chaque fois que le Sud fera alliance avec l’Occident. Et la sœur du dictateur – pressentie pour lui succéder – ne semble pas plus disposée à relâcher la détente ni à calmer le jeu diplomatique. Kim Yo-jong est d’ailleurs réputée bien plus revancharde que son aîné. Le temps n’efface pas si facilement les vieilles rancœurs. Même au bout de soixante-dix ans.
Alexandra Parachini