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Une inversion des rôles

Nous l’entendons à longueur d’articles, d’émissions et de déclarations politiques, la montée des partis europhobes et eurosceptiques menace notre Union européenne (UE) désormais sexagénaire. On assiste ainsi à une curieuse inversion des rôles. Quelle que soit son opinion vis-à-vis de ces partis, il faut bien préciser qu’à quelques exceptions près, ils n’ont jamais été aux manettes. Il est trop facile de les déclarer responsables de la désaffection croissante des citoyens pour l’UE, ils n’en sont que le symptôme et non la cause. S’il faut trouver un «coupable», il est à rechercher chez ceux qui ont exercé ou exercent actuellement le pouvoir.

Ce ne sont pas les partis europhobes qui ont décidé de sauver les banques en 2008 et de perpétuer le système économique existant comme si de rien n’était. Ce ne sont pas les partis europhobes qui ont saigné à blanc le peuple grec. Et les partis d’extrême droite n’ont en rien obligé les partis de gouvernement à reprendre leur discours sur l’immigration qui représenterait une menace existentielle pour l’Europe – une dérive à laquelle le Luxembourg a échappé.

Il serait peut-être temps pour les dirigeants européens de réaliser leur autocritique, d’admettre les erreurs qu’ils ont pu commettre – qui n’en commet pas ? – de faire une forme de mea-culpa. Et surtout de montrer que l’UE ne se résume pas aux clichés de l’austérité et d’un paradis pour lobbyistes de multinationales.

Les citoyens s’inquiètent de la pollution aux pesticides, des perturbateurs endocriniens présents un peu partout dans les produits de consommation courante? L’UE doit en faire une priorité, s’affranchir de la pression des industries chimiques et prouver qu’elle est là pour les citoyens, pour les protéger. Les grands groupes paient moins d’impôts que les artisans ou patrons de petites boîtes ? Là encore, les dirigeants doivent placer cette injustice en tête de leur agenda.

Ces deux exemples parmi de nombreux autres ont plus de chance de réconcilier les citoyens avec l’idée de construction européenne qu’une défense commune dont on entend déjà les bruits de bottes ou qu’une UE à plusieurs vitesses qui risque de la rendre encore plus illisible pour tout un chacun.

Nicolas Klein