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Une faute politique

Une petite devinette. X est un dirigeant d’un pays arabe qui réprime dans le sang toute forme d’opposition – qu’elle soit laïque, de gauche, estudiantine ou islamiste – au nom de la lutte contre le terrorisme. Sa police et ses forces armées n’hésitent pas à pratiquer la torture, y compris sur des citoyens européens. Le pays qu’il dirige est l’une des plus grandes prisons au monde pour les journalistes. Des milliers de civils y sont jugés par des tribunaux militaires et condamnés à mort en masse. Vous avez trouvé?

Non, il ne s’agit pas du Syrien Bachar al-Assad, ce «criminel» qui «devra être jugé et répondre de ses crimes devant la justice internationale», selon les mots du chef de l’État français, Emmanuel Macron. Non, l’homme dont on parle est l’invité d’honneur de la France, reçu cette semaine en grande pompe à l’Élysée pour une visite officielle : le président égyptien, le maréchal Abdel Fattah al-Sissi, arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’État de l’armée en 2013 contre le premier président civil et démocratiquement élu du plus peuplé des pays arabes.

Malgré le recul abyssal de l’Égypte en matière de droits humains sous le règne de Sissi – qui s’avère bien plus féroce que Hosni Moubarak – Macron n’a pas hésité à lui apporter un soutien appuyé hier. Au nom de quoi? La lutte antiterroriste, bien sûr. Un argument totalement fallacieux, Sissi étant dans les faits, à l’instar de Bachar al-Assad, le meilleur allié des jihadistes et un outil puissant de leur propagande. Mais le «criminel» Assad n’a pas eu la bonne idée d’acheter à la France pour des milliards d’euros d’équipements militaires comme l’a fait «l’ami» Sissi.

Que le président Macron soit un adepte de la realpolitik est tout à fait recevable. Si les démocraties ne devaient discuter qu’entre elles, il n’y aurait pas beaucoup de monde autour de la table. Mais de là à faire d’un dictateur sanguinaire un invité de marque reçu avec tous les égards, il y a un pas qui relève de la faute politique. Cet épisode rappelle la tente plantée par le Libyen Kadhafi en plein Paris en 2007 ou la présence d’Assad sur les Champs-Élysées au défilé du 14 juillet en 2008. Attention Sissi, la France n’est pas la Russie, elle n’est pas très fidèle en amitié…

Nicolas Klein

Un commentaire

  1. Rachid ELAÏDI

     »…le président égyptien  » mais aussi le Makhzen au Maroc ou encore Saïd Bouteflika en Algérie et ainsi ,dans les 23 pays arabes. Il faut remarquer que c’est la société qui souhaite ,ardemment, l’intervention de l’armée tellement, l’injustice est criante, les spycaméras dans les maisons des pauvres citoyens (dissidents politiques, intellectuels, journalistes d’investigation…),la corruption,à fond la caisse, aucune institution de l’État n’est considéré par le régime en place …Le maréchal Sissi a des priorités pour dresser l’Égypte et certes , il faut qu’il arrive à élargir sa vision en matière des droits de l’homme. Mais un coup d’État militaire peut en cacher un autre pour rectifier la trajectoire. Le Maroc qui semble être stable est plus agité que l’Égypte et les limogeages du roi ne changent rien à la donne . Fallait-il attendre une situation de RIF catastrophique pour effectuer les limogeages et puis pourquoi ne pas limoger le Makhzen responsable de la situation politique de  »Bergague » qui est une carie dans la société ou chaque citoyen se méfie de l’autre et où l’ordre ne passe pas …et c’est pour cette raison l’armée doit intervenir pour rétablir l’ordre en première république marocaine, certes la voie est épineuse ,mais sans une monarchie parlementaire(si nous supposons le roi n’est pas au courant des méchancetés de Makhzen) ou carrément une république marocaine où l’institution militaire a le rôle de contrôle sinon , le coup d’État militaire est là pour rétablir l’ordre pour un temps . C’est pour cette raison j’ai suggéré à Sissi de ne pas se présenter pour les prochaines élections présidentielle mais l’armée égyptienne serait toujours prête pour intervenir … Et Macron n’est pas à sa première faute , avec le Maroc aussi, lors de sa visite privé qui n’avait pas dénoncé la torture de Makhzen à l’encontre des rifains…

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