Ce sont deux blocs qui se sont opposés la semaine dernière à la Chambre. La loi sur le virage ambulatoire a permis de déceler un fossé concernant la conception du système de santé luxembourgeois. Les uns plaident pour un libéralisme renforcé (CSV, DP, ADR, Parti pirate), les autres défendent le maintien d’un contrôle étatique (LSAP, déi Lénk) pour garantir l’accès universel à des soins de qualité. Mais est-ce que les deux camps sont vraiment si éloignés ?
Derrière les attaques acerbes dirigées contre la politique d’«économie planifiée» de la ministre socialiste de la Santé, Paulette Lenert, on relève des nuances qui viennent confirmer que les défenseurs d’une approche libérale ne comptent en rien écarter l’État de la supervision du système de santé. Le CSV, par exemple, a clairement souligné le besoin de continuer à strictement encadrer une décentralisation de services médicaux, tels que l’imagerie médicale. Pas question de laisser la main libre aux investisseurs privés qui, pour rentabiliser l’acquisition d’une IRM, seraient tentés de mettre en place une tarification démesurée. Afin d’éviter ce genre de dérive, le LSAP défend le principe selon lequel les nouvelles antennes extrahospitalières doivent rester limitées et obligatoirement reliées à un centre hospitalier. L’État propose aussi de prendre en charge 80 % du coût pour l’acquisition des appareils et locaux médicaux à construire ou louer. «Cela enlève la pression commerciale aux médecins qui sont prêts à se lancer», argumente la ministre Paulette Lenert.
C’est précisément le rattachement obligatoire à un hôpital qui provoque l’ire du bloc «libéral». Mais comment éviter sans un certain dirigisme que les nouvelles antennes poussent en nombre illimité, avec le risque d’une concentration dans les zones urbaines? Et quels sont les médecins qui seraient vraiment disposés à renoncer au cofinancement étatique de leur activité?
Le (premier) virage ambulatoire a été pris dans la douleur. La décision la plus sage des députés, après un débat houleux, a certainement été de procéder, au bout de deux ans, à une évaluation du nouveau cadre légal. De plus, il ne faut pas oublier que deux tiers des électeurs récemment sondés créditent le gouvernement sortant d’une bonne note en matière de santé.