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Un couple inégal

Il est assez révélateur que la nouvelle Première ministre britannique, Theresa May, ait choisi de se rendre à Berlin, mercredi, puis à Paris, hier, plutôt qu’à Bruxelles pour ses premières discussions avec ses partenaires européens sur le Brexit. Elle a sans doute l’intention de miser sur les dissensions du fameux «couple franco-allemand» pour sortir son pays de l’ornière.

Et dans l’intérêt des Britanniques, Theresa May serait bien avisée de parier sur la casaque Merkel plutôt que sur la casaque Hollande tant leurs poids politiques respectifs en Europe ces dernières années ont paru aux antipodes. Dans le couple franco-allemand, aucun doute, comme le dit l’expression populaire, c’est «Madame qui porte la culotte».

Mercredi, la chancelière avait fait montre de toute sa compréhension à l’égard du Royaume-Uni, assurant que Londres avait tout son temps pour notifier officiellement sa demande de sortie de l’Union européenne. Pour cela, les autorités britanniques se doivent d’activer l’article 50 du traité de l’UE qui enclenche les deux années de négociations de sortie. Hier midi, le discours du président français allait dans une tout autre direction : l’article 50 doit être activé «le plus rapidement possible», «il ne peut pas y avoir de discussions qui précèdent les négociations», proclamait-il. Mais quelques heures plus tard, François Hollande atténuait déjà ses propos, parlant de «préparation de cette négociation», même si bien sûr, «le plus tôt sera le mieux».

Et cet épisode ne fait que refléter la relation franco-allemande de ces dernières années. Lors de la campagne présidentielle française de 2012, le candidat socialiste n’avait cessé de marteler qu’il renégocierait les traités européens, qu’il ferait tout pour mettre en place une politique économique de relance à l’échelle de l’UE. Mais à peine élu, le petit mari soumis s’envolait pour rendre visite à madame à Berlin pour lui signifier qu’elle n’avait pas à s’inquiéter ou à le réprimander : «Non, il n’y aura pas de renégociation des traités ou de politique de relance ma chérie; et bien sûr que c’est d’austérité que l’Europe a besoin, mon amour…»

Nicolas Klein (nklein@lequotidien.lu)