Le masque est bien malgré lui devenu un accessoire de mode. Pourtant, avec ses élastiques qui vous transforment les oreilles en feuilles de chou et sa barre en métal qui lamine le nez, ce n’était pas gagné. Depuis Michael Jackson et hormis quelques touristes japonais phobiques des bactéries, nous n’avions jusqu’à présent jamais vu personne porter de tels masques en dehors d’un hôpital. Le Covid-19 et la grande faucheuse sont passés par là et voilà qu’il est à présent devenu étrange, voire suspect, de ne pas porter de masque à l’extérieur.
Comme les gouvernements en distribuent en grande quantité après avoir tergiversé sur leur utilité avérée et que leur port est devenu obligatoire, les réfractaires potentiellement suicidaires ou bravaches n’ont plus d’excuses. La virilité exacerbée du mâle alpha n’en est pas une non plus, même si au pays où Chuck Norris et Donald Trump sont rois, seuls 29% des hommes en portent un. Depuis quand sauver la vie de ses proches fait-il d’un homme une lopette ?
Moi, j’entends des airs d’Ennio Morricone à chaque fois que je noue mon bandana rouge sang derrière ma tête et j’ai envie de hurler à la caissière de la supérette du coin «Haut les mains, c’est un hold-up ! La caisse vite !» en la pointant avec la baguette que je viens d’acheter. Question de génération, je suppose.
Les masques, nous les portons avant tout pour éviter le scénario catastrophe, mais un juteux business s’est vite mis en place pour les transformer en accessoires de mode, du griffé ou pailleté en passant par le banal qui coûte la peau des fesses et par ceux imprimés de mâchoires de loups-garous. Internet en déborde et le créateur néerlandais Ronald van der Kemp a orchestré un défilé confiné et masqué le 28 avril dernier. Alors même si l’efficacité du masque est toujours mise en doute, rêvons-nous superhéros, princesses, cow-boys ou Vikings et remportons ce règlement de comptes à O. K. Covid.
Sophie Kieffer