Nous mettons-nous potentiellement en danger en traversant le quartier Gare à Luxembourg ? Non. Nous ne sommes pas en train de traverser les favélas de Rio avec des lingots d’or sous les bras et un néon qui clignote sur la tête. Il faut remettre les choses en perspective et distinguer entre insécurité et sentiment d’insécurité. L’être humain développe ce dernier lorsqu’il se sent en danger. La notion de danger, comme celle de peur, est subjective, propre au vécu et aux expériences de chacun. Faut-il pour autant ignorer ce sentiment et se moquer de ceux qui le ressentent sous prétexte que les quartiers autour des gares sont toujours des quartiers «chauds» ou qu’un rien effraye les gens ? Certainement pas. Il ne faudrait pas non plus instrumentaliser ce sentiment à des fins électoralistes. La sécurité est un droit fondamental que les habitants du quartier Gare réclament depuis plus d’une vingtaine d’années quand le CSV ne chauffait pas encore les bancs de l’opposition. Déjà à l’époque, des gamines se prostituaient sur des terrains vagues pour une dose d’héroïne, des sans-abri dormaient dans les entrées d’immeuble, des passants étaient dépouillés de leurs biens et de longues ombres sillonnaient les rues et les parcs.
La sécurité n’a jamais été la spécialité du quartier. Ce n’est pas une excuse pour laisser les choses se détériorer et la criminalité s’installer. Habitants, commerçants et personnes qui travaillent dans le quartier ont le droit, au même titre que les autres résidents de la capitale ou du pays, à une certaine qualité de vie. La situation dans le quartier Gare ne doit pas être ignorée ni minimisée, mais le sentiment d’insécurité ne doit pas être exagéré non plus pour le bien-être des habitants du quartier qui sont aux premières loges. Les plus anciens ont vu leur quartier changer et pas qu’en bien. Ils ont aussi vu une succession de mesurettes plus ou moins efficaces. Fatigués d’avoir trop accepté et assimilé, ils attendent d’être reconnus autrement que comme des citoyens de seconde zone.
Sophie Kieffer