Le «merde alors» du ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, face au ministre de l’Intérieur italien, Matteo Salvini, a résonné dans toute l’Europe ce week-end grâce aux médias. Il faut dire que le membre de l’extrême droite transalpine ne l’a pas volé.
En parlant de l’immigration africaine, il avait insinué que le Luxembourg avait choisi de faire venir de «nouveaux esclaves» pour «remplacer les enfants» que les Luxembourgeois ne faisaient plus et ainsi faire tourner le pays et l’économie. La réplique de Jean Asselborn, furieux, ne s’était pas fait attendre : «Au Luxembourg, cher Monsieur, on avait des dizaines de milliers d’Italiens! Ils sont venus comme migrants, ils ont travaillé au Luxembourg, pour que vous en Italie vous ayez l’argent pour vos enfants, merde alors!» (lire également notre édition du week-end).
Ce n’est pas uniquement le langage fleuri utilisé par Jean Asselborn comme ponctuation après son argumentaire qui a surpris chez les médias européens. Non. C’est aussi le fait qu’un ministre luxembourgeois ait pu sortir de ses gonds ! Chose rarissime, du moins en public. En effet, pour énerver un ministre luxembourgeois comme cela, il faut en dire des inepties, en répéter des idioties.
Sur la vidéo diffusée sur internet, le ministre italien de l’Intérieur, qui a la mémoire courte, semblait satisfait de la colère de son collègue européen. Comme si dorénavant il allait s’amuser à titiller ses homologues à grands coups de phrases insultantes ou provocatrices jusqu’au point de rupture.
Même s’il permet de gonfler sa cote de popularité chez les électeurs les plus hargneux, ce petit jeu ne fonctionne qu’un temps. Ces fanfaronnades populistes sont-elles vraiment constructives pour l’Italie dans le long terme ? Quel poids aura cet individu en Europe dans quelques mois quand son manège aura usé la patience de tous ses interlocuteurs? Ce n’est pas seulement lui qu’il décrédibilisera à terme, mais aussi l’Italie et les Italiens. Ce n’est pas vraiment le moment: outre le problème migratoire, le pays a bien d’autres défis à relever (économiques, budgétaires…). Et une Italie seule ou isolée ne pourra pas espérer résoudre ses problèmes.
Laurent Duraisin