L’image était assez saisissante. Vendredi soir, aussi bien les ministres et les syndicalistes que les patrons avaient le sourire. L’accord tripartite, ficelé en à peine quelques heures de négociations, a le don de satisfaire chaque camp.
Le gouvernement a pu se contenter de son enveloppe de 500 millions d’euros pour offrir au camp syndical une adaptation partielle du barème d’imposition à l’inflation et au camp patronal une meilleure prévisibilité en ce qui concerne l’évolution des coûts salariaux.
De plus, la prolongation du plafonnement des prix de l’énergie, jusqu’à fin 2024, permettra de freiner l’inflation, ce qui profite à la fois aux ménages, dotés d’un pouvoir d’achat renforcé, et aux entreprises, dispensées de devoir financer une succession de tranches indiciaires.
Enfin, les adaptations fiscales décidées au niveau du logement, chères aux verts du ministre Henri Kox, font que chaque parti gouvernemental a obtenu gain de cause, avec un DP opposé à toute folie budgétaire et un LSAP qui a réussi à obtenir davantage de justice fiscale.
La troisième tripartite en à peine 12 mois semble donc être un succès sur toute la ligne. Fin septembre dernier, le patronat avait signé le poing dans la poche un accord jugé insuffisant. Fin mars, l’OGBL avait été le seul partenaire social à avoir refusé de signer le compromis trouvé dans la douleur.
À chaque fois, le gouvernement a tenu à se féliciter des mesures prises, importantes à la fois pour la cohésion et la paix sociales. Lors des deux tripartites de 2022, le même gouvernement espérait toutefois aussi avoir négocié un accord suffisamment étoffé pour ne pas devoir revenir à la table des négociations en cette année électorale 2023.
L’inflation galopante, dopée par la guerre que mène la Russie contre l’Ukraine, est venue en décider autrement. Et, à vrai dire, qui peut affirmer aujourd’hui que la tripartite a dit son dernier mot avant les législatives du 8 octobre ?
Au vu de l’expérience de ces 12 derniers mois, il est peu probable que tout coulera de source jusqu’à fin 2024, date d’échéance de l’accord trouvé vendredi. Les sourires affichés risquent encore de tourner à la soupe à la grimace. La vigilance doit l’emporter sur toute fanfaronnade électorale.