Et si le plus scandaleux, dans ce débat sur le glyphosate, n’était pas l’opposition entre pro et anti sur sa dangerosité, mais plutôt la lenteur des progrès sur ses alternatives ?
Alors que l’Europe vient de re-signer pour cinq ans avec cet herbicide controversé, la majorité des médias continuent en effet de compter les points entre les lobbyistes de l’industrie agroalimentaire, qui jurent que le glyphosate est inoffensif, et les lobbyistes écologiques, qui affirment le contraire.
Si la question mérite d’être tranchée une fois pour toutes, n’est-il pas aussi urgent de sortir de ce débat de la façon la plus moderne qui soit, en inventant un modèle agricole sans glyphosate?
D’autant qu’un tel modèle a déjà existé. Petit rappel, valable aussi pour ceux qui parlent du bio comme d’une lubie nouvelle : il a existé une agriculture avant le Roundup. Elle a nourri l’humanité pendant des siècles, tout en préservant la biodiversité, ce que ne sait plus faire l’agriculture moderne.
Et, surtout, réinventer un monde sans glyphosate redonnerait un peu de crédit à ce monde moderne qui semble parfois adopter une politique de progrès à deux vitesses. Comment est-il possible que la science du XXIe siècle, qui tutoie l’atome, peine autant à créer des alternatives crédibles au glyphosate?
Pour l’instant, l’alternative principale est manuelle et mécanique, bref, prendre plus de temps et de main-d’œuvre, ce que refuse l’agriculteur moderne. Alors, à quand un herbicide naturel et inoffensif pour l’environnement ?
Surprise, il existe déjà. Une entreprise française, Osmobio, a développé un herbicide à base de végétaux. Son efficacité, dit-elle, est «équivalente» à celle du glyphosate, et, en France, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques a déjà jugé ce produit inoffensif. Hélas, des «blocages administratifs» empêchent pour l’instant sa commercialisation. De même, le web abonde de recettes d’herbicides naturelles éprouvées par les particuliers, mais leur usage à grande échelle se fait toujours attendre.
Mais peut-être que la science n’est pas tant le problème que l’hostilité que suscitent certains progrès…
Romain Van Dyck