Légaliser le cannabis à des fins récréatives ne veut pas dire tout permettre et transformer le Luxembourg en paradis de la fumette. Non, permettre aux amateurs de Marie-Jeanne de se faire un kif de temps en temps, c’est surtout le meilleur moyen que les pays qui l’ont autorisée ont trouvé pour maîtriser le marché et la qualité des produits ainsi que protéger la santé de leurs citoyens. Car, il ne faudrait pas l’oublier, le cannabis reste une drogue malgré ses vertus médicales reconnues au point d’en légaliser l’usage.
Sur le papier, l’idée n’est pas mauvaise en soi. Reste qu’en pratique les choses sont un brin différentes, comme le montre l’exemple canadien. La part du space cake du marché illégal s’est certes réduite, mais il reste le fournisseur principal des fumeurs de pot canadiens qui profitent de tarifs plus avantageux et d’une plus grande variété de produits sur le marché noir. Autre argument avancé après près d’un an et demi d’expérience : la facilité d’achat sur le marché noir. Le service est de proximité, contrairement aux coffee shops. Donc plus rapide.
La ruée vers l’or vert anticipée par l’État canadien, les investisseurs et les planteurs ressemble pour le moment davantage à un pétard mouillé qu’à une manne financière. La production légale et bio de cannabis coûte cher. Les produits sont taxés et l’ouverture d’un coffee shop a un coût, de même que le personnel. Tout cela se répercute sur le prix final et donc sur le consommateur. Des contraintes que n’ont pas les dealers à la sauvette.
Les interdictions – car il en reste un paquet – ne font peur à personne. Va-t-il être aisé de désintoxiquer les fumeurs de joints habitués à la sulfureuse clandestinité et à l’adrénaline qu’elle procure pour les faire rentrer dans le droit chemin ? Le Luxembourg a intérêt à mieux travailler sa copie. Les experts canadiens le disent, leur loi sur la légalisation a été réalisée dans l’urgence. Alors législateurs, cool, men !
Sophie Kieffer