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Perturbateurs européens

Il faudra davantage à l’Europe que le juvénile visage d’Emmanuel Macron pour redorer son blason. Mardi, les États membres réunis au sein du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale ont adopté une définition a minima des perturbateurs endocriniens. Ces substances que l’on trouve dans les pesticides, mais aussi dans les détergents ou les habits, provoquent cancers, érosion des facultés cognitives, obésité et diabète. Entre autres.

Le sujet fait débat depuis 20 ans et a valu à la Commission européenne de se faire taper sur les doigts par la justice de l’UE en 2015. Il faut dire qu’à peine installé à Bruxelles, l’exécutif européen présidé par Jean-Claude Juncker avait enterré des recommandations plus contraignantes concoctées par la Commission précédente. Pourtant, celle-ci ne s’était déjà pas distinguée par son hostilité pour l’industrie chimique.

Relayés par des centaines de scientifiques parmi les plus compétents et des dizaines d’ONG, trois pays tenaient tête aux lobbys et à leurs relais politiques européens et nationaux : le Danemark, la Suède et la France. Mardi, les deux pays scandinaves ont campé sur leur position en faveur d’une protection maximale de la santé. La France de Macron et de son médiatique Monsieur Hulot ont en revanche baissé les armes. Mais peut-être le jeune président ne voulait-il pas jeter d’ombre sur sa lune de miel avec Angela Merkel ? Car sur ce dossier, c’est Berlin qui freine avec le souci de préserver les profits de sa puissante industrie chimique, dont les deux géants sont BASF et Bayer.

Dommage pour Macron qui rate l’occasion de traduire pour les citoyens ses creuses déclarations d’amour à l’Europe. Dommage pour cette Europe déjà si cabossée qui manque encore la chance de privilégier la santé de tous sans souci des intérêts financiers de quelques-uns. Et peu semble importer le coût public de l’échec. Les ravages sur la santé humaine des perturbateurs endocriniens sont estimés au bas mot à 150 milliards d’euros par an dans l’UE. La facture est réglée par le contribuable. Tant que les actionnaires se régalent.

Fabien Grasser