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Panique à bord

La ruée vers l’or noir en Lorraine prend des proportions hallucinantes, voire inquiétantes. Jeudi matin, du côté de Thionville, l’anarchie était telle aux abords d’une station Total que la police a été dépêchée pour gérer la circulation. Il faut aussi calmer les esprits qui montent rapidement dans les tours, tandis que les moteurs chauffent des heures durant. Les altercations, parfois violentes, affolent les compteurs. Depuis l’introduction de la remise gouvernementale de trente centimes d’euros – c’est tout l’art de l’État français, ça, de trouver des solutions qui créent encore plus de problèmes qu’il n’y en avait au départ –, on a cette curieuse impression d’avoir basculé dans un monde postapocalyptique à la Mad Max.

C’est la panique à bord des voitures écumant les pompes, mises d’autant plus à sec par la grève qui touche les dépôts de carburant. Les durites finissent par lâcher quand l’un tente de gratter une place et que l’autre remplit ses bidons, sans se préoccuper de ceux qui en ont absolument besoin. Les mêmes, sans doute, qui se pressaient dans les supermarchés au printemps 2020 pour faire des stocks de papier-toilette et paquets de pâtes. À croire, à l’époque, que le monde était davantage frappé par une épidémie de gastro-entérite que par un virus respiratoire.

Le comble, ce sont les camions de ravitaillement qui se retrouvent souvent coincés dans les files interminables! Le pire, ce sont les secours obligés de sortir de la réserve et de sonner l’alerte : à ce rythme, pompiers et ambulanciers ne pourront bientôt plus assurer leurs interventions. Depuis hier, en Moselle, un arrêté préfectoral leur donne enfin la priorité. Sur le papier officiel, du moins. Dans la loi de la jungle, c’est une autre histoire.

Pendant ce temps-là, au Grand-Duché, les stations ont rarement aussi peu fait le plein de plaques frontalières. On n’y croise plus que les irréductibles fumeurs. Sûr que la flambée du diesel à plus de deux euros le litre a de quoi freiner brutalement l’élan habituel. Les rois du pétrole luxembourgeois peuvent se rassurer, le tourisme à la pompe va très vite redémarrer. Dans quinze jours, la ristourne française tombera à dix centimes. Avant de disparaître fin décembre.

Alexandra Parachini