Charles Goerens, le doyen des eurodéputés luxembourgeois, s’est interrogé hier sur le nombre d’États membres qui soutiennent encore pleinement le projet européen. Sans nommer des pays, il a estimé que parmi les Vingt-Sept, seuls peut-être encore 25 restent engagés pour l’UE. «Depuis dimanche, on n’est peut-être plus que 24», déplore l’élu libéral. Sa liste devrait comprendre la Hongrie du Premier ministre d’extrême droite Viktor Orbán, la Slovaquie dirigée par le populiste Robert Fico et, désormais, la République tchèque, où le parti d’extrême droite dirigé par Andrej Babiš vient de remporter les législatives. Faudra-t-il bientôt ajouter la France à cette même liste?
C’est en tout cas dans un contexte politique très tendu que le Premier ministre, Luc Frieden, s’est adressé mardi au Parlement européen. Pour faire face aux multiples défis qui se posent, il serait «primordial que nous retrouvions notre adhésion au projet européen». Mais, comme le fait remarquer Charles Goerens, combien de pays sont encore de véritables soutiens de l’UE, comme alliance de paix et de stabilité?
L’inquiétude est de mise. Le chaos et «l’irresponsabilité politique» qui règnent en France «déroulent non plus un boulevard mais une autoroute à l’extrême droite», comme le souligne, à juste titre, Béatrice Delvaux, l’éditorialiste en chef du journal belge Le Soir. Une extrême droite qui est donc déjà solidement ancrée à travers l’Europe et qui ne cesse de marquer des points en Allemagne et au Portugal. Sans oublier la victoire du nationaliste Karol Nawrocki à l’élection présidentielle en Pologne et l’Italie dirigée par la présidente du Conseil néofasciste Giorgia Meloni. «Au moins», cette dernière se montre-t-elle plus pro-européenne que l’on aurait pu le craindre.
D’ici à ce soir, on devrait être fixé sur la suite des évènements dans l’Hexagone. Formation in extremis d’un gouvernement – toujours aussi fragile, faute de volonté de compromis entre les partis –, dissolution de l’Assemblée, voire une élection présidentielle anticipée? Une France qui finirait par tomber aux mains de l’extrême droite constituerait non seulement un danger pour la démocratie, mais aussi une menace existentielle pour le projet européen.