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Mal-aimée, à tort

S’agit-il vraiment d’une «source de danger pour le vivre-ensemble», comme le redoute l’ASTI? C’est peut-être aller un peu loin, mais il est quand même frappant de constater le désamour de plus en plus flagrant pour la langue française au Luxembourg (lire ci-dessus). «La situation est paradoxale, puisque le français est, à la fois, une langue extrêmement parlée, mais aussi négativement connotée», note Claire Geier, la présidente de l’Association de soutien aux travailleurs immigrés, au moment de présenter une publication intitulée Langue française au Luxembourg. Entre déclin et défi pour le vivre-ensemble.

Ce déclin n’est pas une surprise en soi. Depuis plusieurs années, on ressent le fait que le français n’a plus vraiment la cote, davantage parmi les (jeunes) Luxembourgeois que parmi les résidents de nationalité étrangère. Certains enseignants font état d’un véritable boycott des élèves à l’égard de l’apprentissage de cette langue qui reste pourtant solidement ancrée au Grand-Duché. Il s’agit non seulement d’une des trois langues officielles, mais le français reste aussi la langue la plus employée dans le monde du travail, même si l’anglais continue à gagner du terrain, surtout dans le secteur financier. Pour offrir à chaque enfant les meilleures chances de réussite à l’école, l’alphabétisation en français sera proposée dans toutes les écoles à partir de l’année scolaire 2026/2027, en parallèle à l’alphabétisation en allemand.

Dans les rangs de l’ADR, on fustige une «francophonisation» du Grand-Duché, au détriment du luxembourgeois. La défense du multilinguisme est peu crédible pour un parti qui fait partie – pour reprendre le constat de l’ASTI – des «courants réactionnaires et conservateurs qui rejettent autant l’étranger que sa langue». En réalité, ce n’est pas le fait que la langue luxembourgeoise subisse une légère érosion – à relativiser au vu de la croissance de la population – qui menace le «trésor culturel» qu’est le multilinguisme. Le déclin du français pèse bien plus lourdement. La vraie question à poser est : les méthodes d’apprentissage dans les écoles sont-elles encore adaptées? Car la langue française est devenue une mal-aimée. À tort, faut-il ajouter, au vu de sa richesse et de son importance sociétale au Luxembourg, et au-delà.

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