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Luxembourg : croissance toxique

Le Luxembourg continue de rester enfermé dans un cercle vicieux. Davantage de croissance est synonyme de prospérité et est garant d’un système de sécurité sociale généreux. Plus de croissance génère cependant aussi plus de trafic, plus de résidents et donc un renforcement de la crise du logement. Aujourd’hui, le virage climatique est mis en avant pour rendre la croissance plus durable. Le «Pacte vert» promu par la nouvelle présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, est censé concilier croissance économique et réduction des émissions de CO2. Une équation qui n’est pas viable selon Éloi Laurent, professeur à l’université de Stanford. Interrogé hier dans les colonnes de nos confrères du Soir, l’économiste souligne que «le Pacte vert est voué à l’échec s’il est placé sous l’égide de la croissance économique». Éloi Laurent indique que le bouquet énergétique mondial repose à 80 % sur les énergies fossiles. Chaque point supplémentaire de croissance se traduirait par «l’aggravation des crises écologiques».
«La croissance est un déni de réalité et le plus grand obstacle à la transition écologique. Or ce déni est au cœur du Pacte vert européen, dont les maîtres mots sont découplage et efficacité matérielle au nom d’une croissance qui n’a de durable que le nom», poursuit-il. Sa conclusion : une «stratégie de croissance» n’offre de solution à aucune des trois grandes crises auxquelles nous sommes confrontés en ce début du XXIe siècle : la crise écologique, la hausse des inégalités et la crise de la démocratie.
Pour financer le virage écologique, Éloi Laurent plaide notamment pour taxer davantage les plus grands émetteurs de CO2. «Dix pour cent des habitants de la planète contribuent pour 50 % des émissions de CO2», indique-t-il. Ses propos permettent d’élargir l’horizon d’un débat qui est souvent mené de manière trop unidirectionnelle au Luxembourg. Une réflexion plus approfondie sur la croissance économique mais aussi sur les moyens d’atteindre les objectifs climatiques urge plus que jamais.

David Marques