On est le 31 mars 2022. Au bout de négociations houleuses, l’OGBL refuse de signer un premier accord tripartite visant à atténuer la flambée généralisée des prix, provoquée par la guerre d’agression lancée par la Russie contre l’Ukraine. Le premier syndicat du pays n’était certainement pas opposé aux aides financières débloquées par l’État, mais une ligne rouge avait été transgressée à ses yeux : une modulation démesurée de l’index, qualifiée de «démantèlement social». Le LCGB et la CGFP ont fini par cautionner le compromis conclu avec le gouvernement et le patronat.
À ce moment, le front syndical uni semblait rompu. Le Premier ministre, Xavier Bettel (DP), accompagné de plusieurs de ses ministres, avait démonstrativement participé au meeting du 1er-Mai du LCGB. L’OGBL s’est retrouvé isolé, mais a réussi à rebondir courant 2023, lorsque le gouvernement a décidé, lors d’une nouvelle tripartite, de rétablir le système d’indexation dans son intégralité. Les trois syndicats représentatifs à l’échelle nationale avaient retrouvé leur union.
Cela n’a pas empêché une poursuite de la guéguerre entre les représentants de la population active. L’OGBL n’a jamais caché son ambition de créer un syndicat unique. À intervalles réguliers, le même OGBL s’est attaqué de manière virulente au LCGB, qui n’a jamais hésité à riposter. Encore au printemps 2024, les deux camps se sont livré un duel musclé lors des élections sociales. Il ne faut également pas oublier que la CGFP refuse bec et ongles que l’OGBL, également ancré dans le secteur public, soit associé aux négociations des accords salariaux dans la fonction publique.
Ces divergences de vues sont aujourd’hui oubliées. Le «mérite» revient au gouvernement conservateur-libéral qui s’est rapidement attiré les foudres du camp syndical. En cause, la réforme annoncée des pensions, suivie des clashs sur la négociation des conventions collectives et la libéralisation des heures d’ouverture dans le commerce. OGBL et LCGB forment désormais une alliance sacrée pour mener une fronde commune. Ils clament qu’une nouvelle division, comme ce fut le cas au printemps 2022, est exclue. Face à ce front uni, le gouvernement aura fort à faire pour sauvegarder la paix sociale, atout majeur du Luxembourg.