Des policiers qui contrôlent sans distinction tous les habitants qui déambulent dans la rue, des drones équipés de caméras et de haut-parleurs qui surveillent des quartiers entiers et qui rappellent bruyamment à l’ordre les contrevenants qui ne portent pas de masque, des régions entières bouclées que les habitants ne peuvent plus quitter sous peine de poursuites… Nous avons tous vu ces images au mois de février à Wuhan, en Chine, épicentre de l’épidémie de coronavirus. Elles ont surpris et inquiété. Jamais cela ne pouvait arriver chez nous pensait-on. Et pourtant! L’arrivée du coronavirus en Europe a changé notre conception d’une liberté pourtant si chérie. Évidemment, la situation sanitaire est telle qu’il faut une mobilisation générale pour enrayer la pandémie. Mais à n’importe quel prix ? En France, des policiers peuvent vous arrêter et vous verbaliser parce que vous n’avez pas le papier adéquat prouvant votre droit de marcher dans la rue (la fameuse attestation). Mieux, chez ces mêmes voisins (et pas uniquement chez eux), les habitants acceptent que des drones passent au-dessus de leur toit pour voir qui fait quoi et avec qui. Et gare à la réprimande par haut-parleur. Au Luxembourg, certains jeunes habitants réunis dans un coin de nature pour se rencontrer et discuter ont, il y a quelques semaines, fui des policiers venus les contrôler. Leur crime : être trop nombreux et se trouver dans l’espace public sans raison valable. Et ne parlons pas des territoires devenus subitement inaccessibles (l’Allemagne par exemple), des dénonciations à la police pour signaler un passant qui ne devrait pas se trouver dehors, du fait que les États ont pu décider que les appartements des habitants étaient dorénavant leur «cellule» jusqu’à une date inconnue. Inimaginable il y a quelques mois à peine. Et aujourd’hui, on parle d’applications de traçage sur nos smartphones pour nous avertir au cas où nous aurions potentiellement côtoyé une personne malade. Le coronavirus a créé un monde orwellien. Vivement que le Covid-19 soit vaincu.
Laurent Duraisin