Le cadeau expédié par Harry et Meghan, depuis les États-Unis, est bien arrivé jusqu’à Buckingham. Le grand déballage annoncé ne souffle aucun détail qui défrise les têtes couronnées britanniques. Ce colis, que l’on disait piégé, ne contient finalement rien d’explosif. Juste de quoi irriter davantage la famille royale, dysfonctionnelle comme tant d’autres. Cela tient sans doute du parti pris de cette série documentaire, actuellement diffusée sur Netflix. Le journal intime du couple livre un récit très binaire, qui oppose le glamour d’une romance passionnée à la froideur de l’institution monarchique. Jamais de contradiction aux «accusations» portées, seulement des témoignages complaisants de proches amis.
Les Sussex, déchus de leurs privilèges, prennent soin de ne pas attaquer frontalement ceux avec qui ils ont rompu les liens distendus. C’est la presse à scandale qui en prend pour son grade. Les tabloïds l’ont bien cherché, à se déchaîner – en vertu d’un contrat tacite passé avec la royauté – sur les membres surtout féminins de la cour. Au fil des confidences, Meghan Markle affiche d’ailleurs un mimétisme avec sa défunte belle-mère, toutes deux harcelées au point d’avoir songé à mettre fin à leurs jours. Harry nous apprend comment les campagnes de dénigrement sont orchestrées de l’intérieur des palais, les fuites savamment distillées pour détourner l’attention sur l’un ou l’autre rejeton de cette lignée d’enfants terribles. Qui préfèrent se tirer dans les pattes plutôt que se serrer les coudes. L’unique «révélation» intervient quand Harry trahit les coulisses du conciliabule de Sandringham, en janvier 2020, visant à écarter le prince et son épouse de leurs obligations officielles. Il y brosse un portrait peu reluisant d’un frère hurlant sa colère, d’un père dans le mensonge et d’une grand-mère étriquée dans son éternelle réserve.
Libérés, délivrés, Harry et Meghan sont aujourd’hui les joyeux exilés de la couronne, profitant de leur lopin de terre californien et des poules qui y picorent. Où ils gagnent – assurent-ils – leurs propres dollars sans recevoir un penny d’argent public. Une catharsis à l’américaine, qui ne suscite toutefois pas la compassion outre-Manche.
Alexandra Parachini