Tous les matins, le même cinéma. Il faut maquiller ses peines, farder les bleus de l’âme. Un peu de cosmétique pour cacher la misère. Il suffit de faire bonne figure et jouer la commedia dell’arte. Pour s’en aller affronter la société et ses brutalités. Trouver une place dans l’étroitesse d’un monde injuste. Qui dénigre les moins forts, les moins beaux, les moins fortunés. Chercher curieusement à se faire bien voir de ceux qui ne nous prêtent aucune attention. Quelques pitreries pour amuser la galerie. Illusion parfaite de l’équilibriste.
Tous les soirs, le même rappel cinglant à l’habile marionnettiste, qui tire les ficelles de son destin tragicomique. Drapé dans l’intimité de la détresse. Le masque tombe comme un rideau lourd. Les souffrances oubliées pour quelques heures rejaillissent au visage et se reflètent dans la cruauté du miroir. La tête ailleurs, le clown triste n’a plus le cœur à la gaudriole. Parfois, il ravale ses larmes pour mieux noyer son chagrin au fond du verre à moitié vide. Anesthésie générale du défaitiste.
Ainsi, nous enseigne le Statec dans sa dernière étude, l’indice de satisfaction de la population envers la vie a dégringolé. La confiance aux autres s’est sérieusement étiolée. Et le sentiment de solitude envahit les existences à l’abandon.
C’est dur de regarder les malheurs de son prochain en face. Il y a ceux qui nous fuient comme la peste, au cas où ce serait contagieux. Ceux qui nous donnent un bon coup de pied aux fesses, juste pour faire violence. Ceux qui minimisent nos drames intérieurs, parce qu’après tout, il n’y a pas mort d’homme. Ceux qui s’en foutent, tout simplement.
Et puis, il y a ces personnes, rares donc précieuses, sur qui l’on peut s’appuyer. Ces êtres si chers, on peut les compter sur les doigts d’une seule main et la leur sera toujours tendue. Leur soutien est inébranlable et leur présence, inestimable.
Devant eux, on se met à nu sans craindre de jugement. On ne baisse pas les yeux. On les laisse volontiers y plonger, jusqu’à l’abîme des maux indicibles et des fragilités que l’on ne doit pas montrer. Il n’y a alors plus aucun rôle à endosser. L’empathie n’est pas une marque de faiblesse. C’est au contraire la marque des gens bien.
Alexandra Parachini
Bien écrit, bravo. Le nombre de gens qui se sentent isolés et seuls ici au Grand Duché m’a frappé. N’ayons pas peur d’être contaminé par la souffrance autrui.
Et si cela avait toujours été le ressenti des gens qui n’avaient jusqu’alors jamais osé le dévoiler ?