Le futur du modèle social luxembourgeois, qui repose depuis des décennies sur la concertation tripartite entre gouvernement, syndicats et patronat, va en partie se jouer aujourd’hui. Comme le rappelle André Roeltgen, le président sortant de l’OGBL, dans l’Interview du lundi qu’il nous a accordée, ce modèle est non seulement «le garant de la paix sociale» mais constitue aussi «un facteur important pour le développement économique, politique et social du pays».
Jusqu’à il y a peu, aucune des trois parties n’a jamais ouvertement affirmé avoir perdu la face. Des accords ont certainement fait grimacer, mais le fait que chaque camp ait été obligé de mettre de l’eau dans son vin a fait que chacun a pu vivre avec les résultats durement négociés. Depuis la mi-septembre, l’UEL a radicalement changé sa position. Le nouveau président de l’association patronale, Nicolas Buck, tente depuis de longues semaines d’expliquer sa nouvelle approche. En vain. Car la nouvelle méthode de travail proposée par l’UEL est assez paradoxale. Le camp patronal ne souhaite plus «négocier» les réformes urgentes du droit du travail, mais évoquer face au seul gouvernement ses propositions et revendications. Il serait hors de question de négocier ce genre de dossiers politiques au Comité permanent pour le travail et l’emploi (CPTE), organe pourtant choisi par le gouvernement pour préparer le pays aux défis du futur.
Il n’est pas sûr que cette méthode puisse éviter au patronat de continuer à se «faire b…», comme l’a décrit Nicolas Buck dans les colonnes du Land. La méthode à l’ancienne a fait ses preuves. La croissance économique en témoigne. La solide compétitivité des entreprises aussi. En parallèle, les inégalités sociales ne cessent de se creuser. Qui est donc le vrai perdant des négociations tripartites ?
Il faut espérer que le ministre du Travail, Dan Kersch, ait commandé du vin et de l’eau pour la réunion très attendue du CPTE, prévue aujourd’hui. Un retour à la table des négociations, combiné à une volonté de trouver des compromis équitables, est primordial pour sauver une cohésion sociale déjà fragilisée.
David Marques