Accueil | Editoriaux | Le nucléaire à la peine

Le nucléaire à la peine

L’énergie nucléaire offre, selon ses supporters, une production d’électricité «continue, décarbonée et compétitive». L’argumentaire repris par un pétitionnaire pour demander un référendum sur la construction d’une centrale nucléaire au Luxembourg est soutenu par à peine 224 signataires. Une deuxième pétition, lancée en parallèle, émane de l’association Lëtz Atom, qui milite pour la construction d’une centrale nucléaire à Schengen. La requête avait récolté jusqu’à vendredi soir 132 signatures. «La plupart des Luxembourgeois sont favorables au développement de la filière nucléaire», avance pourtant Benjamin Ptak, en se référant à un sondage Eurobaromètre. Le président de Lëtz Atom affirme aussi que «la plupart» des élus avec lesquels il a pris contact ne seraient pas opposés au nucléaire. Soutenir la construction d’une centrale équivaudrait toutefois à un «suicide politique».

Même si le CSV se dit favorable au soutien financier de la recherche sur l’énergie nucléaire du futur, le gouvernement est officiellement vent debout contre les centrales de Cattenom et de Tihange qui, en cas d’accident majeur, signeront l’arrêt de mort du Grand-Duché. Une très large majorité de députés appuie cette position. La pression politique est cependant insuffisante : Cattenom doit tourner au moins jusqu’en 2046, tandis que le gouvernement belge veut non seulement prolonger l’exploitation de ses réacteurs existants, mais aussi construire deux nouvelles centrales. Seule l’Allemagne résiste, en dépit de la volonté initiale des conservateurs du chancelier désigné Friedrich Merz de relancer des centrales.

Les six nouveaux réacteurs de nouvelle génération (EPR) que compte construire la France vont au moins coûter 67,4 milliards d’euros. Il faudrait donc compter quelque 11 milliards d’euros pour implanter une telle centrale au Luxembourg, soit 37 % de l’ensemble des dépenses prévues dans le budget de l’État 2025 (29,6 milliards d’euros). Rien que d’un point de vue financier, il semble donc irréaliste de construire un Cattenom 2.0 le long de la Moselle. S’y ajoute le faible soutien politique et populaire, comme ce fut déjà le cas en 1976, lorsque le projet d’une centrale à Remerschen avait été massivement rejeté par les Luxembourgeois.