Même s’il a finalement été retiré de la loi Covid votée jeudi, le principe de la délation, initialement inscrit dans le texte, semble être la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Les petits partis d’opposition mais aussi bon nombre d’observateurs fustigent la supposée transformation de l’État de droit en État répressif, le tout sous le couvert de la lutte contre le coronavirus. Les critiques acerbes sont-elles justifiées ? Oui, mais les comparaisons avec des régimes autoritaires vont bien trop loin. Dans ce contexte, il faut condamner l’assimilation avec le régime nazi faite par le syndicat (chrétien) de cheminots Syprolux.
Il faut tout d’abord rappeler que tout fonctionnaire ou employé d’État est d’ores et déjà obligé de dénoncer d’éventuels crimes et délits dont il prendrait connaissance dans le cadre de ses fonctions. La ministre de la Santé, pourtant juriste de formation, a maladroitement tenté d’élargir cette obligation pour signaler des infractions liées aux mesures d’isolement et de quarantaine. Elle s’est expliquée tardivement, jeudi, à la tribune de la Chambre pour préciser que la mesure devait en premier lieu permettre aux agents de l’Inspection sanitaire d’agir contre des personnes Covid+ qui ne répondent pas aux appels de contrôle ou qui admettent ouvertement briser l’obligation d’isolement. «Si elles partent à la pêche sans permis, ces personnes risquent plus que si elles brisent leur isolement», a constaté la ministre devant les députés.
Tout le monde s’est finalement résolu à l’évidence que l’élargissement du principe de délation allait trop loin. Cela n’a pas empêché un net durcissement des restrictions anti-Covid. «Oui, nos libertés ont été partiellement restreintes. Et ceci d’une manière inédite. Mais ces mesures sont nécessaires afin de protéger nos concitoyens, nos proches et nous-mêmes, et elles sont limitées dans le temps», soutient le Grand-Duc dans son discours de Noël.
L’objectif premier de ces mesures est adopté par une large majorité de la population. La conduite de certains résidents entraîne malheureusement la nécessité d’un resserrage de vis. Il faut toutefois éviter de perdre toute proportionnalité. La discussion à venir sur une stratégie sanitaire à plus long terme doit permettre de réévaluer l’emploi de la main de fer dans un gant de velours prônée par le gouvernement.
David Marques