David Lentz, le procureur de l’affaire LuxLeaks, aura donc attendu le dernier jour du délai légal pour déposer un appel général dans ce dossier brûlant. En plein été, au début des congés collectifs, la nouvelle est tombée un 1er août, parce que le hasard fait toujours bien les choses. Il est des pratiques qui ne trompent pas et celle-ci est édifiante. L’objectif était clair : passer sous le radar une annonce qui ternit un peu plus, si besoin en était, l’image du Luxembourg. Une excellente idée, mais n’est pas Machiavel qui veut. Car, étonnamment, c’est raté. Et dans les grandes largeurs.
Cet appel a une seule conséquence : celle de renvoyer à la barre, comme prévenu et non comme témoin, le journaliste français Édouard Perrin, à l’origine des révélations. En première instance, il avait été acquitté, contrairement aux deux lanceurs d’alerte Antoine Deltour et Raphaël Halet. Si Henri Eippers, le porte-parole du parquet, affirme que l’appel général a pour objectif de ne pas «saucissonner» l’affaire, peut-on vraiment être dupe ?
La très indépendante justice luxembourgeoise, qui n’a sans doute pas subi la moindre pression du gouvernement ou de PricewaterhouseCoopers, s’est donc lancée dans une croisade contre la liberté d’informer. Un combat qui aura une seule conséquence : marquer au fer rouge le Grand-Duché.
Le procès de première instance a été du pain béni pour les médias étrangers, qui n’ont eu de cesse de dresser un portrait peu flatteur d’un pays où les intérêts politico-financiers sont tellement imbriqués qu’ils en deviennent incestueux. En témoigne la fameuse affaire du papier à en-tête de l’administration fiscale, utilisé au sein-même de PWC.
L’appel sera une nouvelle occasion de se moquer de la dérégulation luxembourgeoise. Ce sera surtout l’occasion de voir un journaliste sur le banc des accusés pour avoir fait son travail : informer. La farce n’avait que trop duré en première instance. Le choix de la prolonger de la sorte ne saurait être anodin. Mais le dindon de l’histoire n’est jamais celui qu’on croit.
Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)
Le choix des dates n’est effectivement pas innocent. Il est clair que le procureur a lâchement et sciemment profité des vacances de Fabien Grasser pour faire son annonce, évitant ainsi la « une » assassine que Fabien lui aurait réservée à coup sûr lol.