C’était il y a deux ans. En juillet 2016, la Commission européenne entamait une procédure pour «déficit excessif» contre le Portugal. Depuis la crise financière de 2008, le pays frôlait la faillite et subissait chômage endémique et problèmes sociaux.
Pas grand monde, à commencer par la Commission, mais aussi les agences de notation, ne le croyait capable de renouer avec la croissance et de réduire son déficit… Le pays était, à les entendre, au bord de l’abîme, et seule une cure d’austérité pouvait encore le sauver.
Nous sommes en 2018, et le déficit budgétaire portugais est passé sous la barre des 2 %, la croissance du pays fait des envieux, les investisseurs accourent et le chômage a été divisé par deux depuis 2013.
Pour les Portugais les plus pieux, tout ceci doit avoir des allures de miracle! Rien de divin pourtant. Lisbonne s’est simplement écarté du chemin tracé par Bruxelles, peut-être pavé de bonnes intentions, mais infernal…
Car, depuis 2015, un gouvernement socialiste antiaustérité a pris le contre-pied de la politique du gouvernement précédent, de droite. Ce dernier avait suivi à la lettre le mode d’emploi bruxellois : gel du salaire minimum et des retraites, hausse des impôts, réduction des aides publiques…
Le nouveau Premier ministre, Antonio Costa, a au contraire augmenté le salaire minimum en échange de baisses de cotisations pour les employeurs. Retraites et allocations familiales ont été revalorisées, ce qui a relancé le pouvoir d’achat.
Les impôts des plus modestes ont été baissés, la vague de privatisation des biens publics a été stoppée… Avec le résultat que l’on sait : en 2017, le Portugal a célébré sa «croissance du siècle» (2,7 %).
Pour Bruxelles, le succès du Petit Poucet portugais est un camouflet, car il blasphème le culte de l’austérité prôné par sa locomotive allemande qui, elle, montre des signes d’essoufflement.
Mais il est encore hasardeux, pour les socialistes, de crier victoire. Car au risque de mécontenter tout le monde, on peut se demander si la résurrection portugaise n’est pas le fruit des deux politiques : une gestion plus rigoureuse des comptes publics et une meilleure restitution du pouvoir d’achat?
Romain Van Dyck