Les canons grondent dans l’est de l’Europe, l’ours russe s’est réveillé. Le temps de l’insouciance et des conflits lointains est révolu depuis le mois de février dernier. Un électrochoc. Le rêve de voir un continent enfin apaisé après la chute du mur de Berlin est passé. Au début des années 90, l’heure était pourtant à la démilitarisation. Chez nos voisins allemands, cela s’est traduit par la retraite de centaines de milliers de soldats américains, français, canadiens, anglais qui faisaient face aux troupes du pacte de Varsovie. Les bases se sont transformées en friches, comme à Trèves, et sont devenues les vestiges d’un passé enfin révolu. Les armées européennes ont ensuite fondu en effectifs : la menace de l’immense armée russe s’était évanouie dans la nature. Place dorénavant aux soldats professionnels pouvant être projetés rapidement pour des opérations courtes ou des guerres éclair. Adieu les grandes batailles de chars sur des plaines verdoyantes au grand dam des généraux et à la grande joie des populations civiles qui ne vivaient plus dans la crainte de voir leur vie balayée par un affrontement armé. Et puis le XXIe siècle est arrivé…
Deux nouveaux blocs se sont constitués, un conflit a éclaté, la peur est revenue. Et les pays européens, placés sous le parapluie protecteur de l’OTAN (et des troupes américaines), doivent maintenant tenter de remonter le temps en reconstituant leurs forces en nombre et en armement. Évidemment, des voix s’élèvent pour critiquer le fait que les armées européennes ont été réduites comme peau de chagrin au fil des décennies depuis le début des années 90. Mais à l’époque, qui est le fou qui aurait été élu s’il avait dit qu’il allait garder le même nombre d’hommes sous les drapeaux pour faire face à une menace qui n’existait plus?
La donne a aujourd’hui changé et les budgets de l’armée vont gonfler en conséquence. Au Luxembourg aussi. Tout le monde devra faire sa part. Faire son devoir. Oui, l’Europe se réarme et cela n’augure rien de bon pour l’avenir. Même si c’est pour protéger nos pays démocratiques face à des menaces existentielles. Construire l’avenir tout en se préparant à une confrontation destructrice laisse un goût amer dans la bouche. Le même que ressentaient nos parents pendant la guerre froide.