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La grande muraille verte

Imaginer que la Chine, ce lointain titan, manque de bois au point de devoir en importer du Grand-Duché… Et pourtant, tous les ans, des tonnes de grumes quittent nos forêts pour aller satisfaire l’appétit de la deuxième (voire première) économie mondiale.

Mais la croissance chinoise n’explique pas tout. La Chine a besoin d’importer du bois car, «à cause de la pollution, ses sols sont dans un état lamentables et ils n’arrivent même pas à produire le bois nécessaire pour se chauffer» déclarait récemment un expert au Quotidien.

La Chine a souvent droit à des portraits peu flatteurs. Et mérités, surtout en matière de pollution : l’«airpocalypse», la pollution de l’air, tue 4 000 chinois chaque jour. Et certains territoires sont si souillés qu’on préfèrerait aller se baigner dans la piscine d’un réacteur nucléaire.

Oui, la Chine pue, pollue, et tue. Mais on oublie que la Chine est un pays de contrastes extrêmes : la pire des misères y côtoie une opulence outrancière, le communisme y fait un mariage contre-nature avec le capitalisme… et le titre de pays le plus pollueur du monde est épinglé à côté de celui de pays le plus ambitieux en matière de développement durable!

Car le plus grand projet écologique mondial est chinois : la grande muraille verte. Ce chantier vise à planter des arbres sur une étendue de 4 500 km, pour freiner la mortelle progression du désert de Gobi. Treize millions d’hectares ont déjà été plantés, soit près de 50 fois la superficie du Luxembourg. D’ailleurs, on comprend mieux, face à ces efforts de reboisement, qu’ils aient besoin d’importer du bois.

Ce n’est pas tout : la Chine est aussi le plus grand investisseur dans l’énergie verte, notamment solaire; des écoquartiers poussent un peu partout; les normes environnementales se durcissent…

Les moralisateurs occidentaux feraient bien de ne pas ignorer ces éclaircies dans le ciel chinois. Surtout quand on sait que leurs sombres nuages sont un peu (beaucoup) les nôtres : imaginez l’état de nos vertes contrées, si l’on devait rapatrier toutes les industries que nous avons délocalisées dans la première usine du monde!

Romain Van Dyck (rvandyck@lequotidien.lu)