Deux jours de dispense de travail par mois pour les femmes durant leurs menstruations. C’est l’objet de la pétition n°1865 lancée par Ornella Romito, qui fait son bout de chemin sur le site de la Chambre des députés. Elle devrait à coup sûr avoir droit à un débat parlementaire, tant le texte est massivement paraphé (plus de 3 600 signatures actuellement, sur les 4 500 requises d’ici au 28 juin). Le débat populaire, de son côté, s’est déjà emballé sur les réseaux sociaux. Comme souvent, ça ne vole pas très haut. Morceaux choisis d’éloquence individuelle et d’hystérie collective : « Et pour un ongle cassé, elle est où la pétition ?», «Que ne ferait-on pas pour avoir des congés supplémentaires ! Une honte cette pétition», «Et en ménopause, ça compte aussi ?». Amateurs de clichés sexistes, servez-vous, c’est gratuit ! Au contraire des protections périodiques, soit dit en passant.
On notera que ces commentateurs avisés sont majoritairement à accorder au féminin. À croire que ces dames n’ont jamais connu de cycle infernal. N’ont jamais eu à se tordre les boyaux, à vomir leurs tripes, à se vider comme une bête éviscérée. Tant mieux pour ces privilégiées. Toutes n’ont pas été aussi gâtées in utero. Il n’y a qu’à la télé qu’on peut voir des nanas s’éclater comme des folles, une couche dans la culotte.
En s’emparant de la question, Ornella Romito se doutait hélas qu’elle soulèverait des querelles intestines. Ses motivations sont d’autant plus louables, malgré l’évidence des maux endurés. «Beaucoup de femmes souffrent de douleurs abdominales, de mal de dos et de jambes lors de leurs menstruations», est-elle contrainte de rappeler. Non sans incidence sur le boulot à accomplir la peur au ventre et le sang qui bouillonne dans les tempes, sous les regards inquisiteurs. Coupables et honteuses d’être ainsi faites. Ornella Romito dit regretter que ce sujet «soit encore trop sous-estimé de nos jours». Sous-estimé, quand il n’est pas tout simplement moqué. Si une femme se montre irritée, c’est forcément qu’elle a «encore ses trucs», raille spontanément son entourage. À quand une pétition pour être dispensée de subir la bêtise de ses «semblables» ?
Alexandra Parachini