Les défis qui attendent l’armée luxembourgeoise sont de taille. Rien que la mise sur pied, à l’horizon 2030, d’un bataillon binational avec la Belgique va nécessiter le recrutement d’un nombre inédit de soldats. Le Grand-Duché s’est engagé à fournir la moitié de l’effectif, soit 350 militaires, en plus d’un investissement financier conséquent pour doter le bataillon du matériel requis par l’OTAN.
La réforme de la loi sur l’armée, soumise au vote des députés ce vendredi, doit aider le Luxembourg à remplir ses engagements avec son voisin belge, mais aussi à l’échelle de l’Alliance atlantique. Une des pièces maîtresses est la prolongation de trois à quatre années du service militaire de base. Des nouvelles carrières sont aussi créées, offrant ainsi des perspectives à tous les niveaux d’études. Le réservoir de candidats potentiels est encore élargi, après déjà avoir ouvert les portes de l’armée aux ressortissants des pays membres de l’UE, résidant au Luxembourg.
Le renforcement de l’armée devrait être un objectif largement partagé, surtout si l’on considère le contexte de la guerre déclenchée par la Russie contre l’Ukraine, à moins de trois heures de vol du Grand-Duché. Mais non. Un petit article du texte de loi est venu allumer la mèche, du moins dans les rangs de la CGFP et du Syndicat de l’armée (SPAL). Ils refusent catégoriquement le maintien d’un système d’appréciation des soldats pour grimper en grade militaire. Cette disposition serait contraire à l’abolition de tout système d’évaluation dans la fonction publique, ancré dans le dernier accord salarial. Sans vouloir remettre en question la liberté syndicale, il est peu évident d’appréhender cette position.
Peu importe, finalement, si ce système d’appréciation, en place depuis 50 ans, est une obligation de l’OTAN ou pas – comme le clame le SPAL –, il faut se poser la question de savoir si un soldat qui refuse d’être évalué par ses supérieurs ne s’est pas trompé de métier. S’il ne répond pas aux critères professionnels, éthiques et physiques, il semble irresponsable de lui conférer des responsabilités supplémentaires. Pourquoi donc déclencher cette guéguerre au Herrenberg ? En tout état de cause, la crédibilité de l’armée luxembourgeoise risque d’en prendre un coup.
Hélas, l’armée n’est pas une administration comme les autres: En guerre, ce sont des résultats bien physiques qui comptent, pas des dossiers qui peuvent traîner encore un jour ou 2.