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«Fantasme de répression»

Les mots sont signés par quatre associations, vent debout contre la nouvelle prison Uerschterhaff : «Un fantasme de répression sur 10 hectares». Eran, Eraus an Elo, Richtung 22, RISE et Second Chance ne veulent pas d’un deuxième centre pénitentiaire au Luxembourg.

Abolir la prison n’est cependant pas leur intention. «Mais nous pensons tous que ce système n’aide pas à faire une société plus juste et moins violente, ce qui est scientifiquement prouvé», expliquent-ils dans nos colonnes.

Ces propos sont à l’opposé de ce que prône le CSV. Hier, le Parti chrétien-social est monté à nouveau au front pour réclamer une politique sécuritaire renforcée. Le ministre de la Sécurité intérieure, Henri Kox, se montrerait bien trop «tendre» face à une criminalité en hausse. Les chiffres sur la délinquance établis par la police démontrent, en effet, une hausse continue des infractions.

La comparaison, entre 2021 et 2020, fait état d’un nombre plus important de cambriolages (+6,6 %) et d’un bond des vols avec violences (+20,2 %). De là à conclure que le Luxembourg est en train de devenir une zone de non-droit est cependant exagéré. Entre les lignes, le CSV propage pourtant cette impression. Pour des raisons électorales ?

Au moins, l’insinuation selon laquelle ce sont majoritairement des immigrés illégaux qui agressent et volent les passants n’a pas été répétée. Cela n’empêche pas le maintien de la rhétorique de la «loi et l’ordre». Comparution immédiate, abolition du sursis pour les primodélinquants ou encore maintien de la possibilité de citer en justice des mineurs de moins de 14 ans auteurs de faits graves.

La priorité est donnée à la répression. Une répression dont les associations citées plus haut mettent en doute l’efficacité. Le «cycle carcéral» pousserait automatiquement à la récidive. Seule une minorité parviendrait à y échapper.

Crier au feu est justifié. Mais miser sur la seule répression constitue bien un «fantasme». L’éducation et le social sont des leviers importants à activer. La précarité et l’isolement grandissants sont des fléaux qui peuvent mener à davantage de criminalité.

Nombre d’observateurs mettent d’ailleurs en garde : la crise actuelle va encore renforcer ce phénomène. La société est mise au défi dans son ensemble.