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Faire feu (rouge) de tout bois

Scène banale, quelque part au Grand-Duché : des travaux sont réalisés à un carrefour. La signalisation est donc temporairement modifiée : au lieu des feux tricolores rythmant la circulation, seul subsiste le feu orange clignotant.

Bref, la galère ? Bien au contraire ! Jamais la circulation n’a été aussi fluide. Le principe de priorité à droite a réduit les temps morts dus aux feux rouges et donc fluidifié le trafic. Mais cela a un prix : l’augmentation des risques d’accident, puisqu’une priorité à droite est bien moins respectée qu’un feu rouge.

Cette scène illustre un dilemme récurrent : en matière de sécurité routière, doit-on privilégier la responsabilisation ou la prévention ?

Ce dilemme s’applique à un fait divers survenu dans la nuit de samedi à dimanche. Dans le Nord, des apprentis bûcherons – qui n’en avaient rien à scier de l’embellissement des routes campagnardes – ont tronçonné une dizaine d’arbres en bord de route. Vu qu’ils ont laissé le bois sur place, il y a fort à parier qu’il s’agisse d’un acte de protestation contre la présence de ces arbres. C’est un débat bien connu : ces arbres peuvent devenir des pièges mortels en cas d’accident… mais cette menace pousse aussi les automobilistes à lever le pied, donc à limiter le risque d’accident. Les tronçonneurs du dimanche ont sûrement pensé faire de la prévention en coupant les arbres. Mais est-ce que ces arbres ne poussaient pas justement les automobilistes à prendre leurs responsabilités ?

Ce débat est transposable à tous les sujets qui divisent actuellement les automobilistes : radars, vitesse, téléphone au volant… Hélas, il oppose trop souvent les Fangio de pacotille qui se croient à Spa-Francorchamps aux frileux liberticides qui feraient mieux de lâcher le volant s’ils ont peur à ce point de prendre la route.

Mais ce dilemme ne sera bientôt plus le nôtre : il paraît que la conduite autonome, c’est l’avenir ! Ce sera alors aux ingénieurs automobiles, aux politiques et aux assureurs de s’écharper sur la question des arbres et de la vitesse. Donc en attendant que les robots prennent le volant, tâchons de profiter de notre liberté de (bien se) conduire…

Romain Van Dyck