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Europa-Park et Europe à petits pas

Les projets de mobilité avancent plus rapidement sur d’autres frontières, même les plus fous. Mardi, Europa-Park a annoncé un téléphérique par-dessus le Rhin. Une construction pharaonique à l’échelle du parc d’attractions, qui doit «permettre de délester l’infrastructure routière, explique la famille Mack, propriétaire du parc allemand. Europa-Park compte chaque année plus d’un million de visiteurs originaires de France, et plus de 1 000 collaborateurs alsaciens font la navette au quotidien.»

Qui dit navette dit navetteur, vous me suivez ? Mais au Luxembourg, le grand 8 ne fait rire personne. Les trains sont bondés et les routes saturées. Les uns (navetteurs belges) auront le droit à une voie de covoiturage au départ d’Arlon, au printemps… qui s’arrêtera à la frontière luxembourgeoise! Les autres (navetteurs français) auront le droit à des investissements sur le rail vers Metz, censés multiplier les capacités par 2,5 d’ici 2028… À peine de quoi amortir les nouveaux flux. Il faut comparaison garder, certes les échelles ne sont pas les mêmes. Il n’empêche : pour des questions de business, Europa-Park investit en France dans la mobilité. Car la famille Mack, dirigeants avisés, sait que c’est impératif !

Au Luxembourg, où la force de travail repose à presque 50% sur les résidents voisins, la mobilité transfrontalière reste la cinquième roue du carrosse. On investit a minima de l’autre côté (aide aux abonnements, parkings relais…) faisant mine d’être racketté, alors que l’on conserve la totalité de l’impôt sur le revenu des frontaliers.

On s’est enfermé dans un modèle fantasmé où, un jour, il y aura une solution miracle. Une augmentation drastique de la productivité pour se passer des frontaliers (la tendance est précisément inverse, chiffres du Statec à l’appui). Une généralisation du télétravail en construisant une muraille de centres de coworking à la frontière. Une révolution des modes de transport, avec des Google Cars capables de retourner se garer loin du Kirchberg… En attendant, qui est pragmatique ? La souris Ed ou nos responsables de la mobilité ?

Hubert Gamelon