La probable extradition de Frank Schneider, ancien directeur des opérations du Service de renseignement, agite depuis peu le camp politique. Seulement depuis quelques jours, faut-il préciser. Car l’affaire de cryptomonnaie frauduleuse dans laquelle est impliqué l’ex-agent secret, reconverti en homme d’affaires, ne date pas d’hier. Il en va de même pour la procédure judiciaire devant les tribunaux. L’arrestation de Frank Schneider, recherché par la justice américaine, est intervenue fin avril 2021, près de son domicile français.
Il a fallu attendre le tapage sur les réseaux sociaux, orchestré par un autre ex-agent secret, pour voir l’ADR, suivi du CSV, monter au créneau. Frank Schneider a, lui, adressé une lettre au Premier ministre, Xavier Bettel, pour l’inciter à suspendre l’extradition. Ce dernier n’a pas tardé à trancher : il n’y aura pas d’intervention de la part du gouvernement, qui ne disposerait d’«aucune possibilité légale d’empêcher l’extradition d’un citoyen luxembourgeois qui ne se trouve pas sur le territoire luxembourgeois. Dans ce cas, c’est le gouvernement français qui prend la décision souveraine d’extrader ou non la personne concernée.»
À première vue, l’argument avancé par le chef du gouvernement est valable. Le pur respect de l’État de droit, et donc de la séparation des pouvoirs, appuie la position du Premier ministre. Même le fait que la décision finale d’extrader ou pas Frank Schneider appartient au gouvernement français, qui peut passer outre la décision de justice, ne doit pas forcément remettre en cause l’État de droit. Une immixtion politique dans une affaire judiciaire est toujours délicate, y compris dans ce cas spécifique.
Le député du CSV Laurent Mosar a tancé, mardi, sur les ondes de la radio 100,7, la justice luxembourgeoise et américaine, mais au passage aussi la presse. Le possible conflit d’intérêts du député chrétien-social dans l’affaire Schneider est bien documenté par nos confrères. Il faut rappeler que le CSV s’est montré par le passé très irrité par tout mélange des genres. Il faut tenir compte de tous ces éléments avant de décider de transgresser les frontières entre pouvoir exécutif et judiciaire, sans oublier de s’attaquer à la liberté de la presse.