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Editorial – Quand « Bibi » veut faire peur

Comme à son habitude, Benjamin Netanyahu n’a pas attendu pour semer le trouble dans la communauté juive européenne.

Le Premier ministre israélien, après l’attaque d’une synagogue ce week-end à Copenhague, a appelé les juifs européens à rejoindre Israël, seul pays à même de les protéger selon lui. Au lieu de jouer l’apaisement, « Bibi » agite un dangereux bâton de pèlerin, celui d’un sanctuaire juif, d’une terre promise qui vaudrait toutes les autres.

Comme si, en Europe, les États n’étaient pas à même de protéger les juifs, citoyens à part, selon Benjamin Netanyahu. Ce serait oublier que l’État juif lui-même est également, et régulièrement, victime du terrorisme. Ce serait surtout oublier que les juifs danois et les juifs français, frappés le mois dernier, se sentent d’abord danois ou français avant toute considération religieuse.

Le pavé dans la mare de Benjamin Netanyahu est toujours reçu par les dirigeants européens comme une insulte. Ils n’ont de cesse de rappeler à leurs compatriotes que leur pays est celui qu’ils ont choisi. Accepter la proposition du Premier ministre israélien, c’est participer à la constitution de blocs, croire que le communautarisme sera la solution.

Le discours de Benjamin Netanyahu est à ce titre dangereux. L’aliyah des juifs d’Europe aurait pour conséquence la disparition d’une culture. Malgré les massacres, malgré les pogroms, malgré la Shoah, malgré les attentats, les juifs européens continuent à vivre sur le Vieux Continent.

On ne peut rien reprocher à ceux qui font le choix de répondre à l’appel de Benjamin Netanyahu. On peut juste reprocher à ce dernier d’agiter la terreur quand il faudrait parler de paix. À force de répéter à l’envi que les juifs doivent rejoindre Israël, Benjamin Netanyahu reconnaît une certaine vision du monde, une triste défaite.

Malgré la peur, malgré le sang, les juifs européens ne veulent pas partir. Quelques jours après la tuerie du supermarché Hyper Cacher, à Paris, les juifs français entonnaient la Marseillaise devant « Bibi », dans la grande synagogue de Paris. Car eux n’ont pas perdu espoir.

De notre rédacteur en chef adjoint Christophe Chohin


> Écrire à notre rédacteur en chef adjoint : cchohin@lequotidien.lu

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