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Optimisme et méfiance

« Bonnes nouvelles », « solutions trouvées », « grand jour », « historique » : les principaux négociateurs de l’accord sur le nucléaire iranien trouvé hier sur les berges du Léman étaient presque euphoriques dans la soirée.

Après huit jours de fastidieuses négociations dans les salons de l’hôtel Beau Rivage de Lausanne, l’Iran, les États-Unis, l’UE, la Russie, la France et l’Allemagne viennent peut-être de mettre un terme à un imbroglio commencé il y a plus de dix ans lorsque les Occidentaux ont commencé à soupçonner Téhéran de vouloir se doter de l’arme nucléaire.

Mais le conditionnel reste largement de mise, aucun document n’étant signé à ce jour. « Des solutions sur les paramètres clés du dossier ont été trouvées », a ainsi déclaré le président iranien, Hassan Rohani, tandis que le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, jugeait qu’il s’agit d’un « accord-cadre » et qu’il « reste du travail à faire ».

Le texte définitif reste encore à écrire et doit être présenté aux différentes parties au plus tard le 30 juin. D’ici là, beaucoup d’eau peut couler sous les ponts dans cette affaire aux multiples rebondissements depuis le début de la crise nucléaire iranienne en 2002. Ce n’est en effet pas la première proclamation optimiste dans ce dossier.

Un revirement de Téhéran n’est pas exclu, le président iranien devant composer en politique intérieure avec une frange conservatrice farouchement attachée à un programme nucléaire militaire qui propulserait la République islamique au rang de puissance régionale dominante. Il en va de même pour Barack Obama, confronté au Congrès à l’hostilité d’une majorité républicaine dont une partie appelle à la rupture des négociations avec l’Iran.

Si des ambiguïtés subsistent, il n’empêche que tout laisse à penser que l’on n’a jamais été aussi proche d’un accord. Ce parcours semé d’embûches et à l’issue encore incertaine démontre aussi que la volonté de dialogue mise en œuvre de part et d’autres a fini par porter ses fruits. C’est suffisamment remarquable pour s’en réjouir dans un monde soumis, avec les crises ukrainienne ou syrienne, à des tentations guerrières de plus en plus inquiétantes.

Fabien Grasser (fgrasser@lequotidien.lu)