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Des pays condamnés

C’est ce vendredi soir, normalement, que la conférence de Paris sur le climat doit s’achever. Depuis deux semaines, le monde est réuni pour tenter de se sauver, sans trop y croire. Chaque jour, les représentants venus du monde entier jurent qu’ils ont avancé, promettent de faire des efforts encore plus grands pour atteindre les objectifs de la COP21, voire les dépasser. Les stars se succèdent, venues en jets privés pour quelques heures, afin de mettre les gouvernements sous pression.

C’est beau, c’est généreux. Souvent vain mais généreux. Car sous les promesses, les dirigeants cachent la réalité du réchauffement climatique, cette condamnation actée de nombreuses nations dans le monde, de leurs cultures et de leurs souvenirs. Même en cas de réussite de la COP21, les habitants des Kiribati, des Tuvalu et des Maldives se savent déjà condamnés. Ils sont pourtant à Paris, et jouent le jeu. Le jeu des autres, de ces pays qui vont accepter d’accueillir leurs habitants, ces migrants climatiques qui seront les apatrides de demain. Heureusement, quelques voix se font entendre, comme celle de Denis Lowe, le ministre de l’Environnement de la Barbade, qui a promis de ne pas signer un accord «qui signifie une extinction inévitable de notre peuple.»

Pauvre Denis Lowe, dont le cri ne sera pas entendu. Car les puissants de ce monde n’ont à l’esprit que les statistiques, les projections climatiques. Il leur importe peu de sauver ce qui ne peut plus l’être. Il leur importe de signer ce soir un document qui les exonère de responsabilités pour un an, jusqu’à la COP22, organisée l’année prochaine au Maroc.

Dans un an, la plupart des habitants de la planète n’auront pas trop souffert du réchauffement climatique. Dans un an, il sera encore possible d’agir, entendra-t-on. Mais dans un an, Tuvalu, Kiribati, les Maldives et d’autres atolls paradisiaques auront perdu des dizaines de kilomètres carrés de terres émergées. Car ils sont déjà condamnés, quel que soit l’accord final de cette COP21.

Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)