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Des chiffres à relativiser

Après le nouveau drame en Méditerranée, dimanche, où quelques 400 migrants sont portés disparus en mer, il s’agit de remettre certaines données en perspective. En 2014, 280 000 migrants et réfugiés sont arrivés en Europe (selon l’agence européenne Frontex) pour une population totale et vieillissante de 507 millions d’habitants. À titre de comparaison, le Liban accueille 1,2 million de réfugiés syriens pour une population d’environ 4,5 millions, la Turquie environ 1,5 million et cette liste est loin d’être exhaustive.

À l’aune de ces chiffres, comment ne pas jeter l’anathème sur le continent le plus riche de la planète? Comment certains membres de la Ligue du Nord italienne, pour ne citer qu’un exemple, peuvent-ils parler d' »invasion »?

Bien sûr, comme nous le rappelions dans ces lignes la semaine dernière, l’absence de solidarité entre États membres de l’UE place les pays d’arrivée en première ligne. C’est pour cela que le système dit de « Dublin », qui interdit aux réfugiés de circuler dans l’espace Schengen tant que leur demande d’asile n’est pas acceptée ou déboutée, doit être abrogé. Mais il faut aller plus loin.

L’UE doit tout simplement mettre en place des filières légales d’immigration pour accueillir ces réfugiés et les répartir entre États membres. Elle doit prendre sa part. Dénoncer les trafiquants sans scrupules qui jouent avec la vie de ces personnes est insuffisant, car quels que soient les obstacles et les souffrances, elles trouveront le moyen de parvenir sur les côtes méditerranéennes et de nouveaux drames sont inévitables.

De plus, il est impossible de ne pas mentionner la responsabilité de certains États membres dans cet afflux. Le Danemark, l’Espagne, le Royaume-Uni, l’Italie, le Portugal ainsi que les pays de l’Est ont soutenu l’invasion américaine de l’Irak en 2003 qui est en partie responsable du chaos qui règne en Syrie et en Irak actuellement. En 2011, la France et le Royaume-Uni étaient parmi les fers de lance de l’intervention en Libye qui a provoqué – et c’est un euphémisme – une très grande instabilité. Il est désormais temps d’en payer le prix.

Nicolas Klein (nklein@lequotidien.lu)