Même musée, même méthode, même résultat. Après son «happening» en mai 2014 devant L’Origine du monde, de Courbet, à Orsay, l’artiste luxembourgeoise Deborah de Robertis a une nouvelle fois dévoilé ses charmes crus devant un autre tableau du musée parisien, samedi, le non moins célèbre Olympia, de Manet.
Arrêtée pour exhibition sexuelle, placée en garde à vue, interrompue dans la nuit pour raisons médicales, puis déférée dimanche au parquet de Paris – qui se réservait lundi la possibilité de donner suite à l’affaire avec d’éventuelles poursuites judiciaires – la jeune femme a donc remis ça, avec moins de fioriture que lors de sa première mise à nu, seule une caméra portative filmant le public indiquait qu’il s’agissait bien d’une performance.
Si sa philosophie et sa démarche restent les mêmes, à savoir proposer son interprétation d’une œuvre en abordant la nudité du point de vue de celle qui est regardée – en somme, confronter le public au regard du modèle –, il est bon de se demander pourquoi réitérer ce geste dans un aussi court délai et, pire, sans y apporter grand-chose de nouveau.
Oui, que cherchait-elle donc ? Une récidive qui, du coup, a clairement une saveur de réchauffé. Aujourd’hui, même parmi ses plus ardents défenseurs et ceux, plus généralement, du tout art, les dents grincent : certains évoquent un simulacre artistique, d’autres l’incompréhensible posture d’une artiste autoproclamée.
Que dire, encore, des nombreux commentaires visibles sur la Toile, qui, pour les plus convenables d’entre eux, oscillent entre publicité bien mal acquise (le fameux buzz) et provocation sans substance. Quelques-uns, enfin, y voient, dans cette période de marasme intellectuel et du retour de l’ordre moral, l’expression d’une pudibonderie inquiétante, comme son avocat, Tewfik Bouzenoune, qui évoque là «un très mauvais signal» vis-à-vis des artistes qui «souhaitent s’exprimer de manière trop libre dans l’espace public».
Bref, tout ce que l’on a déjà pu lire il y a un an et demi. Autant dire que, malgré le coup de projecteur qu’elle a bénéficié en 2014, à tort ou à raison, Deborah de Robertis reste une incomprise, statut dont elle semble malheureusement jouer, sans se remettre en question.
Déjà l’année dernière, dans les colonnes du Quotidien, elle confiait, évoquant sa première intervention à Orsay, qu’elle n’avait aucun regret : «Je ne changerais rien et je recommencerais exactement de la même manière.»
Voilà qui est fait, sauf que, depuis cet aveu, il y a eu l’affaire du Casino et cette exposition monographique annulée pour, selon le discours officiel, des incompatibilités humaines. Une déprogrammation – la première du musée en vingt ans d’existence ! – qui a beaucoup desservie l’artiste et ses intentions, se voyant alors obligée de convoquer la presse et de crier à la censure pour sauver sa réputation, déjà bien éclaboussée. Depuis samedi et ce rapide remake en tenue d’Eve, la jeune femme s’éloigne encore un peu plus des musées, qu’elle souhaite pourtant toucher d’une autre manière que par ses effeuillages. Le désaveu d’une artiste perdue dans ses entêtements.
Grégory Cimatti (gcimatti@lequotidien.lu)