Hormis le gouvernement qui fait savoir qu’il a accompli sa part du boulot en assurant les financements, le monde politique est, à l’exception de déi Lénk, silencieux sur la grève des personnels des maisons de soins, déclenchée cette semaine par les salariés affiliés à l’OGBL. Tout comme il est resté mutique lors des négociations tendues dans le secteur bancaire et financier, activité pourtant stratégique pour le pays. Même silence quant au conflit dur qui couve dans le secteur du bâtiment où OGBL et LCGB manifesteront le 5 juillet – chacun de son côté. Soucieux de se démarquer de l’OGBL, le syndicat chrétien appelle aussi à sa propre manif dans le secteur des soins le 25 juin.
Dans la culture du dialogue social luxembourgeois, il est certes d’usage pour les partis politiques de rester à distance des négociations ou conflits entre partenaires sociaux. Mais à quatre mois des législatives, les uns et les autres trouveraient là du grain à moudre dans une campagne atone. Sans doute rétorqueront-ils ne pas vouloir être instrumentalisés par des syndicats et des patrons qui font précisément monter les enchères en vue du scrutin d’octobre, auquel succèderont, en mars, les élections sociales. Et sans doute n’ont-ils pas totalement tort.
Mais au-delà des manœuvres tactiques, ces conflits sont porteurs de sujets illustrant des visions politiques opposées du monde. Ainsi, la grève des personnels de la maison de soin de Bettembourg pose-t-elle la question de la délégation d’un service public à un gestionnaire privé – Sodexo en l’espèce – et de l’usage qu’il fait des fonds sortis tout droit de la poche du contribuable.
Qu’en pensent les trois grands partis qui prétendent mener demain le prochain gouvernement? Qu’en pense le DP, apôtre de l’initiative privée dans le public? Qu’en pense le CSV, entre son héritage social et ses thuriféraires du néolibéralisme? Qu’en pense le LSAP dont on ne sait plus toujours très bien ce qu’il pense de ces sujets ? Face à ces questions cruciales pour l’avenir d’une société, les politiques ne peuvent pas détourner le regard, prétextant que c’est l’affaire des syndicats et patrons. Après tout, ce seront avant tout leurs décisions qui détermineront la place et la considération dont jouiront demain les salariés.
Fabien Grasser