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Choc des pouvoirs

Les mots de l’Association luxembourgeoise des journalistes professionnels (ALJP) ne pourraient être plus clairs. L’arrêt de la Cour de cassation, rendu hier dans l’affaire Nickts, est qualifié de «gifle à la liberté de la presse». Me Pol Urbany, l’avocat de la CLT-UFA, maison mère de RTL, fait un pas de plus en concluant : «Ce n’est ni plus ni moins qu’une censure». En cause, la décision des juges d’interdire à nos confrères de mentionner le nom de Jos Nickts, l’ancien président de la Fédération syndicaliste des facteurs, condamné en 2007 pour avoir détourné quelque 560 millions de francs luxembourgeois (14 millions d’euros) provenant d’un fonds d’investissement du syndicat (lire ci-dessus).

Avant d’aller plus loin, il est important de rappeler qu’un État de droit repose sur la séparation des pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire. Au Luxembourg, la Chambre des députés, le gouvernement et les tribunaux fonctionnent en toute indépendance et, en principe, l’un ne peut pas marcher sur les platebandes de l’autre. Dans une démocratie, la presse est souvent considérée comme le quatrième pouvoir. Elle est censée agir comme un contre-pouvoir face aux trois pouvoirs traditionnels de l’État, en respectant les règles ancrées dans son code de déontologie. 

RTL a pleinement respecté ces principes en voulant revenir sur l’affaire Nickts, qui peut bien être qualifiée d’historique. Au même titre que le détournement de 61 millions d’euros dont a été victime Caritas. L’enquête judiciaire étant encore en cours, la radio 100,7, a pris la décision, dans le cadre de sa remarquable enquête journalistique sur l’affaire, de taire le nom de la directrice financière, qui se trouve dans le viseur de la justice. La présomption d’innocence joue pleinement. Ce n’est plus le cas pour Jos Nickts. Il est presque naïf de penser qu’invoquer son droit à l’oubli fasse… oublier son affaire. Les juges lui ont accordé ce droit. On assiste donc à un choc entre le troisième et le quatrième pouvoir qui fera date. Et les conséquences sur le travail des médias risquent d’être lourdes. Désormais, les yeux sont tournés vers la Cour européenne des droits de l’homme, qui, par le passé, est déjà venue à la rescousse de la presse luxembourgeoise.

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