Accueil | Editoriaux | Choc des cultures

Choc des cultures

La campagne d’affichage a provoqué un vif émoi chez nos voisins lorrains. La semaine dernière, les habitants de Thionville ont découvert une publicité sur les grands panneaux 4 par 3 de la ville vantant les charmes d’une maison close à Sarrelouis en Allemagne. L’affiche ne dévoilait rien de scandaleux visuellement. Seules étaient inscrites les offres de cette «maison» avec un slogan (forcément) aguicheur. Le problème, c’est que les maisons closes sont interdites en France… pas en Allemagne.

La publicité en a donc surpris plus d’un (et d’une), mais il ne faut pas se voiler la face. Les maisons closes disposées judicieusement le long des frontières allemandes, comme à Sarrelouis, ne sont pas là par hasard. C’est un secret de Polichinelle : la clientèle luxembourgeoise et française est évidemment visée. «Pragmatisme», tel est le maître-mot du législateur allemand concernant la gestion de la prostitution sur son territoire. Ainsi, depuis 2002, les prostituées ont le droit d’avoir un contrat de travail et l’État a supprimé l’interdiction de promouvoir la prostitution. Cette décision a fait exploser la demande et la répression des pays voisins, en France notamment, a intensifié le phénomène transfrontalier.

Mais cette légalisation de la prostitution n’a pas réglé tous les problèmes. L’exploitation des femmes aux mains des réseaux mafieux est toujours un enjeu. À Sarrebruck, la commune a vu le nombre de clients frontaliers exploser, ce qui a terni durablement l’image de la ville. Restrictions d’horaires, délimitation du quartier rouge… rien ne semble ralentir ce processus. Et les électeurs sont mécontents. L’installation de ces maisons closes dans des quartiers résidentiels provoque souvent la colère des riverains. L’Allemagne aime la tolérance, mais il y a quand même des limites… d’autant plus quand ce sont des voisins luxembourgeois, français ou belges qui font des allées et venues dans les rues tous les jours (et les soirs) de la semaine.

Et ce n’est pas avec ces campagnes publicitaires organisées de l’autre côté des frontières que les choses vont s’arranger!

Laurent Duraisin (lduraisin@lequotidien.lu)

Un commentaire

  1. Choc des cultures ? On peut dire ça. L’Allemagne, en légalisant tous les secteurs de la prostitution, a clairement affirmé que les hommes avaient un droit au sexe. Il faut donc que de gré ou de force, des femmes soient disponibles.
    La France a choisi l’inverse et considère, comme de plus en plus de pays, après études des résultats des différents modèles, qu’un rapport sexuel acheté est une violence, que pour lutter contre le proxénétisme, il faut décourager la demande, et que pour construire une société égalitaire, l’achat d’actes sexuels ne peut plus être banalisé ni excusé.
    Le Luxembourg devra un jour ou l’autre, se positionner : du côté des plus précaires, qui se retrouvent utilisés sexuellement, ou du côté des profiteurs de ce commerce ?