La couleur kaki commence à se répandre sur le continent européen. Bien malgré elle. En tout cas, ceux qui la porte attisent la curiosité. Il suffit de voir l’incroyable affluence à la journée portes ouvertes de l’armée organisée à la caserne Grand-Duc-Jean à Diekirch hier. Le public est venu découvrir toutes les professions gravitant autour du métier des armes, rencontrer le personnel en uniforme, voir les équipements. Les armes aussi. Ce type de journée a une saveur particulière depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
L’amertume se mêle à la fascination. Fini le temps où le continent européen pouvait profiter des dividendes de la paix, c’est-à-dire sacrifier le budget militaire après l’effondrement du bloc de l’Est. Fin du service militaire, armées devenues professionnelles et configurées pour de brèves opérations extérieures… oui, l’amertume d’un temps qui ne reviendra pas et où le danger était lointain. Le retour de la guerre de masse en Europe a fait l’effet d’un choc dans nos pays, et cela, en quelques années seulement. Les images des tranchées sur la ligne de front, des villes bombardées parfois aveuglément, des ruines de cités autrefois florissantes. Tout cela nous rappelle notre histoire terrible.
Ce retour vers le passé a lieu aussi sur le terrain diplomatique. Les tensions mondiales paraissent aujourd’hui pouvoir être gérées comme on pouvait le faire dans cet ancien temps qui a provoqué tant de dates commémoratives. Les crises s’allongent et mêlent des périodes froides et des périodes chaudes. Aujourd’hui, le canon n’est plus le dernier argument des rois, mais le premier des dictateurs et des autocrates qui veulent affirmer leur pouvoir. La menace a toujours fait partie de l’équilibre entre les nations du monde. Mais, aujourd’hui, il semble que les bombardements de part et d’autre d’une frontière pour faire avancer ses idées ou dicter ses règles soient aussi acceptés qu’un débat houleux à l’ONU.
Nous voilà donc renvoyés à cet ancien monde que nous étions si ravis de quitter. Tous les pays européens doivent relancer la machine de guerre… pour éviter de la faire.