Il n’y a pas que sur les routes luxembourgeoises que l’on croise de plus en plus nos chers voisins français.
Devant les stations-services, la file d’attente s’allonge aussi. Et on les comprend ! Fini le temps où les frontaliers lorrains pouvaient encore faire l’économie d’un plein au Luxembourg. La différence entre le gazole français et le gazole luxembourgeois n’est plus seulement d’une vingtaine de centimes d’euros comme il y a encore quelques années. Avec le litre à 1,5 euro dans certaines stations mosellanes, contre 1,15 euro au Grand-Duché (35 centimes de différence !), il faut désormais avoir une sacrée souplesse financière pour hésiter face à ce grand écart. Et le numéro de contorsionniste va s’amplifier, puisque l’État français prévoit pour l’an prochain une hausse de 6,5 centimes par litre des taxes sur le gazole et de 2,9 centimes de celles sur l’essence. Ouch !
Pas étonnant que de l’autre côté de la frontière, les distributeurs de carburant broient de l’or noir. «La compétitivité et le maillage territorial des stations-services sont (…) fortement menacés», a averti le Conseil national des professions de l’automobile (CNPA). Pour ce dernier, l’exode à la pompe ne fait que s’aggraver, avec une réduction «d’au moins 20%» de la fréquentation des stations-services françaises depuis deux ans.
Une bonne nouvelle pour le Luxembourg ? La logique voudrait que oui : chaque «pétroeuro» étranger vient gonfler les caisses grand-ducales. Mais c’est oublier un peu vite que ce tourisme pétrolier coûte au pays. Déjà en 2015, une étude avait révélé que si les bénéfices associés à la vente de carburant sont importants (2,1 milliards d’euros par an), les «effets négatifs globaux» (sanitaires et environnementaux) coûtent bien plus : 3,5 milliards.
Et sans être un masochiste qui aime payer le prix fort à la pompe, on ne peut que déplorer l’incohérence d’une politique qui défend un or noir «bon marché», alors que cela freine les énergies vertes, l’efficacité énergétique, la lutte contre la pollution, bref, le développement durable.
Romain Van Dyck