Même avec quelques jours de recul, la décision de mobiliser 800 milliards d’euros pour réarmer l’Europe reste stupéfiante. Mais l’investissement massif dans la capacité de défense est sans alternative au vu de la situation géopolitique. Le Vieux Continent se voit désormais confronté à deux menaces : la soif impérialiste de la Russie de Vladimir Poutine et l’imprévisibilité des États-Unis de Donald Trump.
Le Premier ministre, Luc Frieden, reste parmi ceux qui continuent de plaider pour le maintien de bonnes relations transatlantiques avec Washington. Plus facile à dire qu’à faire. Au plus tard au sommet de l’OTAN, fin juin, on devrait être mieux fixé sur les intentions du président américain. Lors de sa déclaration mardi dernier devant la Chambre des députés, Luc Frieden avait insisté sur l’importance de pouvoir s’appuyer sur le fameux article 5 du traité de l’Alliance atlantique. «Si un membre est attaqué, nous le sommes tous. Nous ne voulons pas renoncer à cette garantie de sécurité», a-t-il clamé. Le Premier ministre ne s’est cependant pas adressé au président Trump, mais a lancé un appel plus global : «Nous espérons que le peuple américain ainsi que le Congrès reconnaîtront et assumeront cette responsabilité commune en faveur de la paix mondiale.»
Le paquet de 800 milliards d’euros devra être utilisé pour renforcer la garantie de sécurité que l’Europe peut produire, sans les États-Unis. Le grand défi sera d’investir cette somme astronomique de manière intelligente et ciblée. Luc Frieden n’a toutefois pas caché, jeudi, après la fin du sommet européen, qu’il ne sera pas simple pour les États membres de travailler vraiment en commun pour réussir à «produire cet effort de guerre». Surtout, les grands pays seront tentés de faire profiter en premier lieu leur industrie de l’armement des nouveaux fonds. Des égoïsmes nationaux n’ont pas lieu d’être. Il faudrait bien plus s’orienter vers des capacités et savoir-faire existants. Sur la liste des achats prioritaires définis par l’UE, on retrouve la communication satellitaire et la cyberdéfense, deux domaines dans lesquels le Luxembourg excelle. Chercher des alliés pour continuer à développer ces technologies sera primordial. L’heure n’est pas aux batailles internes.