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Bakou de bruit pour rien

Hier soir a débuté à Bakou, en Azerbaïdjan, la première édition des Jeux européens.

Pendant deux semaines, 6 000 athlètes venus de toute l’Europe vont vivre leurs Jeux olympiques miniatures, dans des installations flambant neuves et devant un public déjà conquis. Parce qu’en Azerbaïdjan, ça se passe comme ça : on ne critique pas les choix du gouvernement et on se doit d’idolâtrer le président, élu démocratiquement depuis 2003, après avoir succédé à son père.

Ilham Aliyev mène, depuis cette date, aux destinées d’un pays riche de ses hydrocarbures. Son exercice du pouvoir est tellement remarquable qu’il a été réélu avec 85,5% des voix en 2013. Il n’aurait, certes, pas pu se représenter s’il n’avait pas fait voter par référendum, en 2009, un texte abrogeant la limite du nombre de mandats présidentiels.

Il n’en fait qu’à sa tête, en fait, Ilham Aliyev. Après avoir accueilli l’Eurovision en 2012, il a vu plus grand, avec ces Jeux européens. L’occasion de marquer de son empreinte son règne, ou plutôt son mandat perpétuel. L’Azerbaïdjan aurait investi, selon les estimations hautes, huit milliards de dollars pour mener à bien le projet. La plus grosse dépense publique de l’histoire d’un pays où le revenu annuel moyen par habitant est de 6 500 euros, soit un peu plus de 500 euros par mois.

Un pays qui a ressuscité d’une répression politique digne de l’URSS. Un pays qui n’a de cesse d’agiter le spectre de la guerre contre son voisin arménien, l’ennemi intime. Mais de tout ça, il n’était pas question de parler, hier soir, lors de la cérémonie d’ouverture.

Et on ne reprochera pas aux athlètes de tenter de gagner des médailles à Bakou, comme ils l’ont fait à Pékin, en 2008, ou à Moscou, en 1980. On ne tiendra pas non plus rigueur au Grand-Duc Henri d’être présent dans la capitale azérie pour le lancement de ces jeux. Avec d’autres dignitaires occidentaux, il va saluer l’œuvre en cours d’achèvement du grand Ilham Aliyev.

On ne se fâche pas avec les dictatures du pétrole. Même pour une compétition sportive de second rang, qui cherche toujours un pays organisateur pour sa deuxième édition, en 2019.

Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)