C’est devenu un rituel. Tous les soirs, sur le coup de 20 h, des centaines de personnes sortent sur leur balcon ou ouvrent leurs fenêtres pour applaudir leurs nouveaux «héros». La première pensée va vers le personnel soignant. Mais les applaudissements s’adressent aussi à tous ceux qui continuent à assurer les services de première nécessité dans une société confinée.
L’initiative de saluer l’engagement sans faille des professionnels de santé, du personnel de caisse et de rayon dans les supermarchés, des chauffeurs de poids lourds, des facteurs ou encore des éboueurs témoigne du regain de solidarité dans un monde où le repli sur soi ne cesse de gagner en ampleur.
Le rituel des applaudissements ne doit cependant pas faire oublier cet égoïsme, qui est d’ailleurs resté présent dans l’esprit de ceux qui ont dévalisé les rayons. Et ces mêmes applaudissements ne doivent pas venir cacher le peu d’estime que bon nombre de personnes ont toujours eu à l’égard de tous ceux qui gardent aujourd’hui le pays à flot.
Il y a encore peu, les frontaliers étaient les seuls responsables de la saturation des routes. Ces mêmes frontaliers n’étaient pas capables d’apprendre le luxembourgeois. Dans le domaine de la santé, le problème de la langue pèse certes plus lourdement. Mais malgré des efforts fournis par le personnel francophone, les critiques ont continué à fuser. Aujourd’hui, tout cela semble oublié.
Avec une forte tendance des indigènes à intégrer la fonction publique, la main-d’œuvre frontalière est indispensable pour assurer la prospérité du Luxembourg. Il s’agit d’une évidence qui n’est cependant pas toujours reconnue à sa juste valeur. On peut citer à titre d’exemple le champion national de l’alimentaire qui n’a pas hésité à offrir en cette période de crise des primes à ses employés. Il y a peu, un violent bras de fer sur une revalorisation de la convention collective faisait encore rage.
Que restera-t-il donc de cette solidarité après les applaudissements ? La réflexion est engagée…
David Marques